Le Département des Langues Étrangères Appliquées de l’Université Française d’Égypte (UFE) a organisé le Congrès ANLEA/AILEA 2023. Pour la deuxième fois de son histoire (la première en 2010 ayant été limitée à cause du volcan), le Congrès ANLEA/AILEA a hissé les voiles et traversé la Méditerranée pour rejoindre l’Égypte et sa capitale si envoutante et romanesque. Ce Congrès a été l’occasion de faire découvrir la formation LEA à l’UFE, d’échanger autour de la formation LEA dans le tissu économique local et de mettre en avant le lien entre la pédagogie en LEA et les projets en lien avec la formation. Le Congrès a été suivi d’un Colloque scientifique intitulé « Perspectives de la recherche en Langues Étrangères Appliquées (LEA) : Affaires et commerce international et Traduction spécialisée ».
Tenu sous la houlette du ministère de l’Enseignement supérieur, ce colloque a invité les enseignants-chercheurs et les doctorants à mener une réflexion sur l’impact de la recherche sur la formation en LEA, à explorer les pistes d’enrichissement des contenus pédagogiques, à orienter constamment les cursus aux besoins du marché, et à penser les recherches en LEA en lien avec les problématiques actuelles. Le Progrès Egyptien a eu l’occasion de s’entretenir avec plusieurs académiciens autour du colloque.



Pr Denis Darpy, président de l’Université française d’Egypte, a assuré : « Tout d’abord, l’Université française d’Egypte est ravie de pouvoir accueillir cette conférence internationale qui rassemble 50 participants de 11 nationalités différentes et qui est là pour faire le point sur l’enseignement et la recherche en langues étrangères appliquées. Le point essentiel c’est bien l’évolution de cette disciple, de cette formation. Il s’agit de recherches mais également d’insertions professionnelles. Les langues appliquées sont un cursus au sein des universités dans le monde entier. L’Université française était la première université en Egypte à mettre en place ce type de cursus et ce type de cursus forme des jeunes particulièrement à l’aise avec les langues pour différents objectifs professionnels qui vont bien au-delà de la traduction. La traduction étant un débouchée mais le journalisme en est un autre, le marketing, l’import-export, les ressources humaines également. Tous nos diplômés en fait sont dans ce type de fonction. Je dirais que 10% ou 20 % de nos diplômés en langues étrangères appliquées font de la traduction. Ce n’est pas un diplôme de traduction, mais un diplôme en langues étrangères appliquées. C’est cela qui est important. Et, donc, si je devais souligner les trois enjeux de cette conférence. Le premier est de faire le point sur l’insertion professionnelle et comment on peut continuer à faciliter l’insertion professionnelle. Quels sont les moyens pour mettre en œuvre et faire connaître auprès des entreprises ce type de formation. C’est la première chose. La deuxième chose : il y a l’insertion professionnelle, mais également en méthode pédagogique, l’arrivée de tous les traducteurs automatiques, de CHATGPT qui transforment complétement la manière dont on va générer le texte. C’est au cœur même de la réflexion pédagogique et scientifique de ces formations. Et cela doit être un des résultats de cette conférence : comment on va s’adapter pour les entreprises à une nouvelle génération d’étudiants qui ne vont pas attendre que les professeurs aient découvert CHATGPT. Le troisième enjeu, c’est de renforcer effectivement le réseau entre des personnalités et des gens issus de différents cultures et pays pour bien installer cette discipline au sein du paysage académique internationale. Donc ce sont ces trois objectifs qui sont ceux de ce congrès. Le tenir ici en Egypte apporte une dimension culturelle extrêmement importante ».
Autour du défi de l’intelligence artificielle, il a ajouté : « Aujourd’hui, on a d’excellents résultats du français à l’anglais, de l’anglais à l’allemand, de l’allemand à l’italien. Les systèmes en arabe ne sont pas encore parfaits. Mais, ils seront. C’est juste une question de temps. Donc, il vaut mieux anticiper plutôt que de réagir. Il faut déjà prendre cela en compte ».



En ce qui concerne le recours à l’intelligence artificielle, la vice-présidente de la Formation, Pr Dima El Husseini a déclaré au Progrès Egyptien : « Le colloque international qui a lieu dans le cadre aussi d’un autre événement, la réunion annuelle de l’Association nationale et internationale des Langues étrangères appliquées aborde cette thématique de recherche liées aux langues appliquées, ce qui veut dire affaires, commerce internationale et traduction spécialisée. Dans ce contexte, l’intelligence artificielle a bien sûr un impact sur le profile lui-même du traducteur, mais aussi sur la méthodologie de la traduction, puisque l’enseignement passe par la méthodologie de la traduction pour ensuite être capable d’appliquer, d’utiliser des outils. Mais, la méthodologie passe avant même l’usage de la technologie. Ce qui veut dire que l’intelligence artificielle qui en ce moment est applicable dans le domaine de la rédaction en général doit être contrôlée par la méthodologie. Donnons un exemple, Microsoft qui donne l’option de visionner les sous-titrages traduits d’un discours oral. Je l’ai testé avec les étudiants. Bien sûr, c’est pratique, mais il y a des défaillances. Les étudiants ne peuvent pas compter à 100% sur ces outils sans avoir acquis la méthodologie pour avoir cet esprit critique. L’esprit critique est très important avant l’usage de la technologie. Pour conclure, il faut joindre la méthodologie à la technologie. Car, la méthodologie est la base de toute maîtrise de traduction ».
Quant aux recommandations du colloque, Pr Dima El-Husseini et Dr Yasmine Barsoum, directrice du département LEA- UFE, ont dit : « Les recommandations sont les suivantes : l’intégration de la langue arabe dans plus de revues en Europe, l’intégration de l’intelligence artificielle et du sous-titrage dans l’enseignement au sein du département des langues étrangères appliquées surtout que nous disposons du potentiel et des enseignants qui savent utiliser les logiciels dans les domaines comme la terminologie, la traduction et l’analyse de discours. La troisième recommandation qui est adressée au département de communication et de marketing, c’est d’augmenter les effectifs des étudiants en langues étrangères appliquées pour répondre aux besoins des entreprises. Elles ont assuré avoir besoin de plus d’étudiants ayant le profil LEA ».
Quant aux points positifs du colloque, elle a indiqué : « Il y en a deux qui sont essentiels à savoir la négociation des partenariats et des mobilités entre notre université et des universités européennes et de France. Et, la deuxième valeur ajoutée, c’est que nous avons pris conscience de la réalité des langues étrangères appliquées dans d’autres pays comme en Afrique et en Europe ».