– Une révélation sur l’équipement militaire du jeune pharaon, vu comme un roi d’or et de fer
Depuis plus d’un siècle, la tombe de Toutânkhamon continue de livrer ses mystères. Chaque découverte apporte un nouvel éclairage sur le plus célèbre des pharaons, longtemps perçu comme un souverain fragile, symbole d’un règne éphémère. Pourtant, une récente étude bouscule cette image : le roi d’or aurait aussi été un guerrier.
Par Dr Bassam Al-Chammaa
(Historien et conférencier international honoré par l’ONU)

Très peu de chercheurs avaient osé s’aventurer sur cette piste. Parmi eux, Lucy Skinner, égyptologue britannique, qui a mené un travail minutieux en s’appuyant sur l’analyse d’images séquentielles d’une pièce exceptionnelle retrouvée en 1922 dans la tombe royale. Son enquête a révélé que les anneaux du vêtement, longtemps considérés comme purement décoratifs, formaient en réalité une véritable armure de cuir. Cette tunique, jamais exposée jusqu’alors, aurait servi de protection au jeune pharaon lors des combats ou des entraînements militaires. Une hypothèse qui transforme profondément notre perception du souverain. Toutânkhamon n’était pas seulement un roi d’or, mais aussi un roi de guerre.

L’armure renaît sous les mains des restaurateurs égyptiens
La recherche de Lucy Skinner a trouvé un large écho dans la presse internationale, notamment dans le “New York Post”, fascinée par cette redécouverte inattendue. La pièce en question- un plastron de cuir raffiné, orné d’anneaux finement travaillés- a été présentée pour la première fois au public le 1er novembre 2025, lors de l’ouverture du Grand Musée Egyptien. Sa restauration, conduite par une équipe de spécialistes égyptiens, représente un modèle de savoir-faire et de patience.

Le cuir, fragilisé par plus de trois millénaires, a été consolidé, nettoyé et traité pour retrouver sa texture d’origine, tandis que la doublure de lin a été soigneusement réajustée. Les photographies exposées montrent avec éloquence l’état du vêtement avant et après sa restauration. Un véritable miracle de précision et de dévouement. Cette prouesse rend hommage aux restaurateurs égyptiens, dont le talent et la passion permettent de redonner vie à des trésors oubliés. Leur travail, salué dans le monde entier, symbolise une fierté nationale, celle d’un pays qui restaure son propre passé avec excellence et émotion.

Le jeune roi devenu chef de guerre

Cette découverte marque un tournant dans la manière d’appréhender la personnalité du jeune pharaon. Pour beaucoup, Toutânkhamon fut avant tout le roi-enfant, figure sacrée d’un âge d’or disparu. Mais l’armure retrouvée change tout. Les traces d’usure et d’éraflures observées sur le cuir doublé de lin témoignent d’un usage réel. Toutânkhamon aurait porté cette tunique sur le champ de bataille, ou du moins lors d’exercices militaires, démontrant un engagement direct dans l’art de la guerre.

Certains chercheurs, à la lumière de ces indices, vont jusqu’à lui attribuer le titre symbolique de “Commandant suprême des forces armées égyptiennes”. Un surnom audacieux, mais révélateur de cette dimension méconnue du jeune souverain. Qu’il ait réellement combattu ou simplement pris part à des entraînements, Toutânkhamon se dévoile désormais sous un jour nouveau : le roi courageux, formé à la guerre et décidé à défendre son royaume.

Une image du roi au combat
Cette lecture trouve d’ailleurs un écho frappant dans l’iconographie royale. Sur une boîte en bois peinte, exposée aussi au musée, deux scènes polychromes illustrent Toutânkhamon debout sur un char, arc bandé, visant ses ennemis. Les détails du dessin sont saisissants, montrant le pharaon, vêtu d’une tenue militaire richement ornée, ce qui incarne la puissance et la maîtrise, ses chevaux lancés à pleine vitesse symbolisant la domination et la bravoure. L’image contraste fortement avec celle, plus répandue, d’un roi fragile et contemplatif.

Ici, Toutânkhamon apparaît en stratège et en combattant, incarnant l’union parfaite entre la gloire, la jeunesse et la force. A travers cette redécouverte, c’est un Toutânkhamon plus complexe qui se révèle. A la fois gardien du sacré et chef militaire, symbole d’un pouvoir où la beauté et la force se confondent. Grâce à la science, à la recherche et à la passion des restaurateurs, le Grand Musée Egyptien nous offre bien plus qu’une exposition, plutôt une réécriture vivante de l’Histoire, où le roi d’or apparaît enfin sous son vrai visage, celui d’un pharaon de chair et de courage.






