Depuis près de deux siècles et demi, le Parlement égyptien demeure la plus ancienne et la plus prestigieuse institution législative du monde arabe. Il n’a jamais été simplement un bâtiment au cœur du Caire, mais toujours un miroir de l’État et de la société, reflétant les ascensions et les déclins de la nation, ses ambitions comme ses frustrations.
En mai 1805, lorsque les savants d’Al-Azhar et les notables du Caire se présentèrent devant Muhammad Ali pour lui dire : « Nous te prêtons serment comme gouverneur au nom du peuple et selon ses conditions », ils posèrent les fondations du premier texte constitutionnel moderne en Orient. C’était la première affirmation claire que le pouvoir n’est ni un don céleste ni une faveur du souverain, mais un contrat entre le dirigeant et les gouvernés. De là est née l’idée.
Au cours du XIXᵉ siècle, l’expérience connut un parcours sinueux : des conseils consultatifs sous Muhammad Ali, puis un bond majeur en 1866 lorsque le khédive Ismaïl créa le Conseil consultatif des députés, première instance législative partiellement élue du monde arabe. Il était modeste — seulement 75 membres — mais représentait une voix nouvelle dans un pays qui n’avait connu jusque-là que la parole venant d’en haut.
Vint ensuite un bref mais éclatant moment d’apogée : la révolution ‘Orabiyya (1881-1882), durant laquelle fut promulguée la première loi fondamentale rendant les ministres responsables devant les députés. Mais tout s’effondra sous les canons de l’occupation britannique.
S’ensuivit un demi-siècle de lutte intermittente : la loi réglementaire de 1883, qui réduisit les pouvoirs du Parlement ; puis la Assemblée législative de 1913, de courte durée ; puis la Constitution de 1923, la plus libérale de l’histoire égyptienne moderne, qui institua un véritable régime parlementaire. Toutefois, son application resta constamment entravée par l’ingérence de la monarchie et la présence britannique.
Après la Révolution de 1952, l’expérience prit un tournant totalement différent : les partis furent dissous, l’ancienne constitution abrogée, et des assemblées furent créées — élues en apparence, mais en réalité désignées — sous diverses appellations : Assemblée nationale, puis Assemblée du Peuple, puis Conseil consultatif.





