La Bourse du coton de Mîna al-Baṣal, avec son bureau orné de magnifiques inscriptions arabes, demeure l’un des joyaux historiques les mieux préservés d’Alexandrie. Malgré les décennies écoulées, le bâtiment conserve un charme authentique et une splendeur architecturale qui témoignent de son rôle central à l’époque où l’Égypte vivait l’une des plus brillantes périodes de son histoire commerciale : l’âge d’or du coton.
Au cœur de cette bourse battaient autrefois les rythmes du commerce mondial, entre négociants, courtiers et exportateurs venus des quatre coins du monde pour conclure des transactions décisives pour l’économie égyptienne.
Selon Mohamed El-Sayed, responsable de la sensibilisation archéologique à la Direction des Antiquités d’Alexandrie, ce bâtiment est l’une des trois bourses pionnières du commerce du coton dans le monde, un statut qui souligne sa place exceptionnelle dans l’histoire économique internationale.
Un édifice monumental au charme intact
Mohamed El-Sayed rappelle que la bourse a conservé toute sa magnificence, comme si l’écho des voix des marchands résonnait encore entre ses murs.
Édifiée sur une superficie dépassant 8 000 m², soit près de deux feddans, elle se compose de deux étages :
•Le rez-de-chaussée abritait 125 bureaux occupés par les banques, les courtiers et les exportateurs.
•Le premier étage était réservé aux attachés commerciaux, aux classificateurs de coton et aux commissaires spécialisés.
L’édifice fut construit sur ordre du khédive Ismaïl, qui en confia la conception à l’architecte italien Pietro Avoscani, l’un des plus célèbres bâtisseurs étrangers en Égypte au XIXᵉ siècle.
Les travaux commencèrent avec un capital de 70 000 livres égyptiennes, une somme colossale pour l’époque, ce qui attira de grands hommes d’affaires venus du monde entier.
Le centre nerveux du coton égyptien
C’est dans ces murs que débutèrent les premières grandes spéculations sur les prix du coton. On y négociait les contrats à terme, un mécanisme innovant qui plaça rapidement Alexandrie parmi les plus importants pôles commerciaux internationaux.
Mohamed El-Sayed précise que dès 1883, l’État ottoman accorda des privilèges aux compagnies étrangères pour posséder et commercialiser le coton égyptien, permettant ainsi de traiter des contrats à terme à la Bourse de Mîna al-Baṣal, alors que le commerce du coton s’effectuait auparavant uniquement sur des cargaisons présentes physiquement.
Des figures emblématiques du commerce en Égypte
La bourse connut des périodes de prospérité éclatante et exerça une influence majeure sur l’économie nationale. Elle regroupait plusieurs des plus grands négociants de l’époque, parmi lesquels :
• Mourinho Chicorrel,
• Zervoudakis,
• Kerdahi,
• Benaki. Tous sont considérés comme des piliers du milieu des affaires en Égypte.
Pietro Avoscani : Un architecte aux empreintes impérissables
L’Italien Pietro Avoscani, concepteur de la bourse, laisse derrière lui un riche héritage architectural. Outre cet édifice, il participa à la réalisation des décors du palais de Ras el-Tin, du palais de Helmiya, ainsi que le palais d’Abbasiyya au Caire, et aussi du quartier d’Al-Azarita à Alexandrie, conçu comme zone de quarantaine pour les voyageurs arrivant dans la ville.





