En marge de sa visite officielle au Liban, le Dr Moustafa Madbouli, Premier ministre égyptien, a répondu aux questions des responsables des instances économiques ainsi que de la Chambre de commerce et d’industrie libanaises, lors d’une rencontre de travail organisée à Beyrouth sous le thème : « Perspectives de la coopération économique et commerciale entre l’Égypte et le Liban ». Cette réunion a réuni de nombreux acteurs économiques des deux pays et a permis un échange approfondi sur les expériences respectives en matière de développement, de réformes économiques et d’investissements.
Interrogé sur la nouvelle capitale administrative et son impact sur la croissance économique, le chef du gouvernement égyptien a rappelé que l’Égypte, malgré son immense superficie, n’avait historiquement exploité que 6 à 7 % de son territoire, en raison de la concentration démographique autour du Nil. Face à une population qui atteint aujourd’hui près de 110 millions d’habitants, il est devenu indispensable, selon lui, d’élargir la zone habitée, de développer de nouveaux pôles urbains intégrés et de créer des opportunités d’emploi pour la jeunesse.
Le Dr Madbouli a expliqué que, depuis l’arrivée au pouvoir du président Abdel Fattah Al-Sissi, l’État égyptien a adopté une vision ambitieuse visant à doubler la superficie urbanisée, pour atteindre au moins 14 % dans une première phase. Cette stratégie repose sur un ensemble cohérent de projets comprenant des réseaux modernes de routes et de transports collectifs, des ports et aéroports de dernière génération, des projets de mise en valeur agricole, ainsi que la création de nouvelles villes destinées à absorber la croissance démographique. La nouvelle capitale administrative s’inscrit dans cette dynamique, aux côtés d’une trentaine d’autres villes nouvelles, dont Al-Alamein sur la côte méditerranéenne.
Répondant aux critiques sur le coût de ces grands projets, le Premier ministre a rappelé que l’Égypte faisait face, en 2013, à un taux de chômage de 13,5 % et à une croissance démographique rapide. La création de nouvelles villes, a-t-il souligné, visait à la fois un objectif de développement à long terme et une réponse immédiate à la problématique de l’emploi. À ce titre, les projets urbains et d’infrastructures, notamment la nouvelle capitale, ont permis de générer près de cinq millions d’emplois, contribuant à la baisse du taux de chômage à environ 6,2 % aujourd’hui, malgré l’augmentation continue de la population.
Abordant la coopération avec le Fonds monétaire international, le Dr Madbouli a insisté sur le fait que le programme économique mis en œuvre par l’Égypte est avant tout un programme national, conçu par les institutions égyptiennes avant d’être négocié avec le FMI. Il a expliqué que l’Égypte avait défini ses priorités en matière de réformes, notamment dans les domaines de l’énergie, des subventions, de la politique budgétaire et monétaire, puis engagé des discussions avec le Fonds sur les mécanismes d’application, le calendrier et certains indicateurs chiffrés.
Le Premier ministre a également souligné l’importance d’intégrer un volet de protection sociale aux réformes économiques, afin d’atténuer leurs effets sur les catégories les plus vulnérables. Selon lui, la stabilité politique et institutionnelle d’un pays joue un rôle clé dans la flexibilité du FMI, qui se montre plus ouvert lorsque l’État démontre sa capacité à mettre en œuvre son programme. Il a précisé que les programmes économiques doivent rester dynamiques et adaptables, notamment face à des événements imprévus tels que les crises régionales ou les fluctuations des revenus stratégiques, comme ceux du canal de Suez.
S’agissant de la coopération économique entre l’Égypte et le Liban, le Dr Madbouli a réaffirmé le soutien constant du Caire à Beyrouth, soulignant que la stabilité et la prospérité du Liban sont étroitement liées à celles de l’Égypte. Il a insisté sur le rôle central du secteur privé dans le développement des investissements et des partenariats, le rôle des gouvernements consistant avant tout à faciliter les procédures et à lever les obstacles administratifs.
Dans ce cadre, il a annoncé des mesures concrètes pour résoudre certaines difficultés rencontrées par les entreprises libanaises, notamment en ce qui concerne l’accès de leurs produits au marché égyptien. Il a également évoqué une coopération renforcée dans le secteur pharmaceutique, à travers l’accélération de l’enregistrement des médicaments libanais en Égypte, en coordination avec l’Autorité égyptienne du médicament.
Le Premier ministre a par ailleurs souligné que la clarté des politiques économiques et financières est un facteur déterminant pour attirer les investissements privés. Il a exprimé sa conviction que le succès des réformes économiques au Liban, même à court terme, pourrait rapidement restaurer la confiance des investisseurs étrangers, rappelant que le pays a longtemps été une destination privilégiée pour les capitaux internationaux.
Les échanges ont également mis en lumière les opportunités offertes par les investissements égyptiens et libanais pour accéder à de nouveaux marchés, notamment grâce aux accords de libre-échange conclus par l’Égypte avec l’Afrique et l’Union européenne. Cette position stratégique, a-t-il estimé, ouvre de vastes perspectives de partenariats entre les entreprises des deux pays.
Enfin, répondant à une question sur le succès de l’expérience égyptienne en matière d’infrastructures, le Dr Madbouli a attribué cette réussite à une planification claire, à une forte volonté politique et à une mobilisation rapide des ressources nationales. Il a mis en avant le recours aux entreprises nationales, la simplification des procédures d’attribution des projets et l’utilisation de financements concessionnels fournis par des institutions internationales telles que la Banque mondiale et la Banque européenne d’investissement. Selon lui, cette approche globale a permis à l’Égypte de bâtir, en une décennie, une infrastructure moderne devenue un puissant levier d’attraction pour les investissements locaux et étrangers.
Cette rencontre a été saluée par les représentants du secteur privé libanais, qui ont souligné l’amélioration des indicateurs économiques égyptiens et exprimé leur intérêt pour un renforcement des partenariats bilatéraux, notamment dans les domaines de l’investissement, des infrastructures et du tourisme, considérés comme des axes majeurs de coopération future entre les deux pays.





