Par Khaled Abou Bakr
Akhbar Al-Youm
Tout nouveau-né d’un père et d’une mère égyptiens, est Egyptien… qu’il soit un terroriste ou un militaire… qu’il soit un savant ou un corrompu… qu’il soit un croyant ou un incrédule… qu’il soit grand ou petit de taille… en fin de compte, il est Egyptien. C’est une vérité que personne ne peut changer. Mais parfois, nous disons : “Ce n’est pas ça l’Egypte, en voyant des personnes qui ne sont pas bonnes, tandis que lorsque nous croisons des bienfaiteurs, nous disons, voilà, c’est ça l’Egypte”. Chacun de nous contribue à esquisser une image de l’Egypte, soit-on des personnalités éminentes et fameuses ou de simples travailleurs partis dans d’autres pays à la recherche d’un gagne-pain. Un grand tableau que nous dessinons et sur lequel nous ajoutons soit de belles lignes qui éblouissent le monde, ou bien des lignes incompréhensibles et mauvaises qui suscitent la colère ou le mécontentement de ceux qui les voient. Le problème dans ce tableau est qu’il est impossible d’en effacer les lignes. Ceci veut dire que si quelqu’un trace une ligne, elle sera ineffaçable du tableau… belle ou laide, un bien ou un mal. Qui d’entre nous ne se rappelle pas l’image de Naguib Mahfouz et de sa fille alors qu’il recevait le Prix Nobel ? Qui d’entre nous peut oublier les rencontres de Magdi Yacoub et de la Reine d’Angleterre ? Qui peut oublier les chansons du peuple britannique pour Mohamed Salah ? Qui d’entre nous également ne se rappelle pas la scène de l’incendie du Complexe scientifique, ou l’image des Frères alors qu’ils encerclaient la Cour Constitutionnelle ? Qui peut oublier le jugement d’un ministre ou d’un gouverneur dans un procès de corruption et de pots de vin ?
Responsabilité collective
Tous ces événements sont déjà tracés dans le grand tableau, qui n’est que la résultante des actes des Egyptiens… tous les Egyptiens. Alors si Kozbara est Egyptien, la chaîne “Al-Hadath” est une chaîne égyptienne, les conduites des conducteurs de Tuk-Tuk et celles des filles de Tik-Tok… ils sont tous et toutes des Egyptiens. Qui est donc responsable de ce que ces gens dessinent sur le tableau égyptien ? La réponse correcte serait : c’est une responsabilité collective qui incombe à tous les Egyptiens. Toutefois, ce sont des paroles théoriques.
La vérité est que l’Etat doit jouer un important rôle pour dessiner le tableau égyptien sans déformation ni laideur. Que possède l’Etat autre que les lois ? Il existe un rôle absent. Ce n’est pas un rôle juridique ou pas, mais dans le cadre de cette grande société multi-culturelle, il faut qu’il y ait une personne, ou un groupe de sages, qui sont puissants et possèdent une autorité exécutive pour dire que cela est inapproprié et loin des éthiques. Je parle là du fait de l’importance de faire face aux actes qui n’enfreignent pas les lois, mais qui violent plutôt les éthiques, le bon sens et qui ne ressemblent pas au peuple égyptien.
Les actes enfreignant les lois sont punis par le Parquet général, mais il existe par exemple des déclarations, des disputes ou de gros mots venant des personnalités publiques, ou d’autres encore véhiculés parfois sur les réseaux sociaux par de simples personnes et malheureusement, elles font toutes partie du grand tableau égyptien. Autrefois, le maire n’imposait pas uniquement la loi, mais il disait en plus que “ceci ne va pas ou est contre les éthiques”. Nous avons besoin d’une pareille dissuasion.
Je ne sais pas comment peut-on la réaliser, car cela diffère dans les villages de Haute-Egypte que dans ceux du Delta ou des grandes villes. Or, tout lieu a un “grand” ou un modèle qui possède une notoriété, qui lui permet d’aider l’Etat à sauvegarder le tableau égyptien. Fuir la vérité, ce n’est pas ça l’Egypte… c’est une grande erreur. Malheureusement, la voix du conducteur de Tuk-Tuk aux élections (avec notre plein respect à son égard), est égal à la voix du professeur d’université. Ils ont les mêmes droits et aussi les mêmes devoirs en tant que citoyens.
J’ai envie de prendre part à une réunion qui regroupera tous les responsables d’investigation en Egypte et les détectives en chef ainsi que la ministre de la Solidarité sociale et les ministres de l’Education et de l’Enseignement supérieur (c’est étrange… n’est-ce pas ?). La vérité est que j’aimerais leur transmettre la réalité de la rue égyptienne sans honte, depuis les plus simples jusqu’aux décideurs.
Réunion de totale franchise
Une réunion de totale franchise, pour présenter des programmes conformément à la réalité, qui diffèreront d’une ville à l’autre et d’une culture à l’autre. Le plus important est de ressentir le risque que nous vivons : des conduites qui ne sont pas criminalisées par les lois, mais qui ne conviennent pas à une grande société et à une grande Histoire comme celle de l’Egypte.
Ces conduites ne sont pas corrigées par les lois, mais plutôt par la science et la culture. Mais cela prendra du temps. Et donc jusqu’à parvenir à ce point, tout maire devrait reprendre son rôle, car en fin de compte, ce sont nos enfants qui hériteront ce tableau égyptien, dont nous avons tracé les lignes. Alors, soit nous sauvegardons ce tableau, ou nous découvrirons qu’il est devenu désagréable à regarder.
