Sous les hautes lumières du centre culturel de Kafr Al-Cheikh, un murmure d’émotion a accompagné l’inauguration du nouvel écrin artistique intitulé « Expérience personnelle », organisé par l’Autorité générale des palais de la culture, présidée par le général Khaled Labban. Cette exposition, qui s’inscrit dans la sixième phase du projet « Théâtre de confrontation et de tournée », offre une plongée sensible dans la nature, les villages et les rivages qui façonnent l’âme de la région.
C’est toute une géographie intime qui se dévoile, celle d’un territoire où la terre, le ciel et la mer dialoguent avec l’œil des artistes.
L’événement s’est ouvert en présence de plusieurs personnalités : le colonel Mostafa Chawqi, conseiller militaire du gouvernorat, le Dr Ahmed El-Shehawi, directeur du département culturel de Kafr Al-Cheikh, le metteur en scène Mohamed El-Sharkawy, directeur du Théâtre de confrontation et de tournée, ainsi que Sayed Mosallam, sous-secrétaire au ministère de la Solidarité sociale. Autour d’eux, une assemblée d’artistes, d’intellectuels et de passionnés formait comme une grande famille réunie au chevet de la création locale.
Sous la supervision du Département central des arts plastiques dirigé par l’artiste Ahmed El-Shafei, 39 œuvres signées par huit plasticiens du gouvernorat sont présentées. Parmi eux :
Dr Jacqueline Bichra El-Kayem, Dr Fadi Boutros, Dr Mahrous Ataqi, Mina Mamdouh, Ali Khamis, Ahmed El-Refaï, Bishoy Yonan, auxquels s’ajoutent plusieurs pièces du regretté Abdallah Chennah, proposées en hommage à son parcours et à son empreinte dans l’art égyptien contemporain.
Lorsque la terre parle
Avec sa série « Terre et Ciel », Dr Jacqueline Bichra offre huit œuvres nourries de tissu, de fibres, de fils, de matières modestes mais transfigurées. Chez elle, l’horizon n’est jamais un simple trait : il devient une frontière fragile entre le labeur de la terre et le souffle de la lumière. Elle raconte la générosité du sol, la présence du Nil, l’humilité des paysages qui portent la vie et la mémoire des habitants.
Le vivant sous toutes ses formes
Dans un registre plus expérimental, Dr Fadi Boutros Mikhaïl expose onze œuvres exécutées au crayon, à l’acrylique ou en art numérique. Il y explore, comme un biologiste-poète, les structures profondes du végétal et de l’animal. Ses compositions abstraites dégagent un rythme interne, une pulsation, où la nature se fait architecture.
Les métamorphoses de la couleur
Dr Mahrous Ataqi, lui, s’est laissé guider par les ailes d’une muse légère : la papillon. Cinq toiles mêlant gouache, huile et acrylique composent un univers de formes géométriques et de couleurs vibrantes. Ces travaux s’inscrivent dans une recherche scientifique menée pour son passage au grade de maître de conférences, mais trouvent ici une dimension presque méditative.
L’éloge des matières premières
Avec deux œuvres profondément ancrées dans la tradition artisanale, Bishoy Yonan rappelle que la beauté peut naître de ce qui est brut. Dans la première, il assemble des placages d’essences rares – palissandre, chêne, acajou, citronnier – pour recomposer un tableau inspiré des barques de pêche de Borg El-Borollos et des maisons rurales anciennes. Dans la seconde, une petite vache en plâtre, assise comme en pleine rêverie, incarne toute la tendresse du monde paysan.
Parallèlement, un espace propose les publications de l’Autorité générale des palais de la culture, offertes à des prix symboliques, comme pour rappeler que la connaissance demeure l’un des piliers de l’art.
Quand le théâtre rejoint la peinture
Le public a également assisté à la représentation de « Touta Touta », pièce écrite par Tarek Ammar et mise en scène par Saïd Mansi. Elle retrace les parcours lumineux de figures égyptiennes telles que Nabawiyya Moussa, Samira Moussa, Ahmed Lotfi Al-Sayed, l’imam Mohamed Abduh, ou encore les savants Ahmed Zewail et Farouk El-Baz. Une manière d’insuffler aux jeunes générations l’envie d’hériter non de statues, mais d’élans.
Organisé en partenariat avec la Région culturelle du Delta oriental et le département culturel de Kafr Al-Cheikh, ce rendez-vous artistique témoigne de la volonté de l’Autorité générale des palais de la culture de ranimer la vie plastique au cœur des gouvernorats.
L’exposition restera ouverte jusqu’au 17 décembre : une invitation à prendre le temps de regarder la région autrement, comme à travers les yeux de ses propres enfants.





