De plus en plus de jeunes femmes choisissent de se mettre en « pause amoureuse ». Derrière le hashtag #BoySober, un phénomène social en plein essor sur les réseaux, se cache une volonté de reprendre le contrôle sur sa vie émotionnelle.
Par Marwa Mourad
Depuis quelques mois, les réseaux sociaux bruissent d’un nouveau mot d’ordre : boy sober. Traduction libre : « sobriété masculine ». L’expression, popularisée d’abord sur TikTok et Instagram, décrit le choix de certaines femmes – souvent jeunes – de prendre leurs distances avec les relations amoureuses hétérosexuelles. Loin d’un rejet des hommes, ce mouvement s’apparente davantage à une détox sentimentale, une période de recentrage sur soi après des expériences affectives jugées épuisantes ou toxiques.
Une pause nécessaire dans la culture de l’hyperconnexion
Dans un monde où les applications de rencontres dictent le rythme des relations, beaucoup de jeunes femmes affirment ressentir une fatigue émotionnelle. Le flux constant d’échanges, les attentes déçues, les comportements de manipulation ou de « ghosting » laissent des traces.
La démarche boy sober consiste alors à faire une pause volontaire, non pas par rancune, mais pour retrouver son équilibre personnel.
Les adeptes de ce mouvement partagent souvent des témoignages sur les réseaux, expliquant comment cette « sobriété amoureuse » leur a permis de mieux se connaître, de retrouver confiance et de redéfinir leurs priorités.
L’autonomie émotionnelle comme nouvel idéal
Ce phénomène s’inscrit dans un contexte plus large : celui de la quête d’autonomie émotionnelle. Après la « self-care culture » et le féminisme de la troisième vague, la génération Z semble vouloir rompre avec la dépendance affective.
Être boy sober, c’est aussi revendiquer une forme de liberté intérieure, où l’amour n’est plus perçu comme une nécessité mais comme un choix éclairé. Plusieurs psychologues y voient une réponse directe aux injonctions contradictoires imposées aux jeunes femmes : être indépendantes tout en restant séduisantes, fortes mais accessibles.
Cette détox devient donc une manière de rééquilibrer la relation à soi et aux autres, sans renoncer à l’amour, mais en le plaçant à sa juste place.
Un phénomène amplifié par les réseaux sociaux
Les plateformes numériques jouent un rôle central dans la popularisation du concept. Des influenceuses comme Tefi Pessoa ou Elyse Myers en parlent ouvertement, mêlant humour et introspection.
Sur TikTok, le hashtag #BoySober cumule des millions de vues, accompagné de vidéos où des femmes racontent leurs réussites personnelles : reprise du sport, nouveaux projets professionnels, voyages en solo, ou simplement sérénité retrouvée.
Mais les spécialistes rappellent que les réseaux amplifient parfois les tendances jusqu’à la caricature. Derrière le slogan, la démarche reste très individuelle : il ne s’agit pas d’une règle universelle, mais d’un outil de reconstruction pour certaines.
Une révolution douce, pas une guerre des sexes
Contrairement à certaines interprétations, le mouvement boy sober ne prône pas la rupture définitive avec les relations amoureuses. Il invite plutôt à rompre avec les schémas nocifs, à cesser de chercher la validation affective dans le regard masculin.
Cette approche séduit d’autant plus qu’elle s’accompagne d’un discours positif : se concentrer sur sa santé mentale, ses passions, ses amitiés, et redonner du sens à la notion de couple.
En ce sens, le boy sober rejoint d’autres mouvements comme la « slow love » ou la « solitude choisie », qui valorisent le temps long et la conscience de soi dans les relations.
Vers un nouvel équilibre relationnel ?
Les sociologues soulignent que ces tendances traduisent une mutation des rapports hommes-femmes : la jeune génération cherche à construire des relations plus saines, égalitaires et conscientes.
En choisissant de s’accorder un temps de solitude active, ces femmes redéfinissent la place de l’amour dans leur vie. Elles affirment qu’on peut être épanouie sans être en couple, et que la véritable intimité commence souvent par soi-même.
Et dans le monde arabe ?
Si le mouvement boy sober trouve son origine dans les sociétés occidentales, ses échos commencent à se faire sentir ailleurs, notamment dans les pays arabes où les jeunes générations investissent massivement les réseaux sociaux.
De plus en plus de jeunes femmes du monde arabe s’expriment sur des plateformes comme Instagram ou X pour évoquer la pression du mariage précoce, les relations inégalitaires ou simplement la nécessité de prendre du recul pour se retrouver.
Sans revendiquer ouvertement l’étiquette boy sober, elles en partagent l’esprit : celui d’un réveil intérieur, d’une autonomie affective et d’une réflexion sur la place de la femme dans la relation amoureuse contemporaine.
Ainsi, ce mouvement planétaire dépasse les frontières culturelles : il témoigne d’une aspiration commune à vivre l’amour de manière plus consciente, plus respectueuse et plus équilibrée.





