La nature créative est propre à l’esprit féminin. La danse orientale propose tout un champ pour se réaliser et pour traduire ses aptitudes artistiques. Le fait d’être unique et incomparable est souligné dans cette danse purement égyptienne avec tout ce qu’elle comporte de couleurs de fascination. Dès qu’une danseuse, soit-elle professionnelle ou débutante, commence à comprendre sa singularité et son talent, le monde se met à briller de mille couleurs. Et au moment où elle maîtrise les règles de cet art, elle peut donc créer sa propre danse qui reflète sa culture et sa perception du monde. D’une génération à l’autre, chaque nouvelle danseuse ajoute son “bagage de talent” à l’actif de cet art tellement singulier qu’il dépasse tous les aspects expressifs.
Depuis belle lurette, les temples se montrent comme le fief de la danse, où les femmes antiques implorent les déesses en se servant des différents moyens expressifs du corps et du visage. Il en est de même pour les Egyptiens de l’Antiquité. Sur certaines fresques anciennes on peut voir des femmes danser pour invoquer les dieux surtout Hathor, la déesse de la fertilité. Il existait également une croyance fort répandue selon laquelle la femme possédait un pouvoir magique, celui de concevoir la vie. Ainsi, traditionnellement la danse orientale était exécutée par les femmes lors de rites de fertilité, associés à la fois à la religion et à l’ésotérisme. Les femmes faisaient tournoyer leur corps et onduler leur ventre afin d’acquérir les faveurs de la déesse de l’amour et de la fécondité, symbolisant ainsi les mouvements de la conception et de l’enfantement.
Un véritable atout pour le corps féminin
Expression d’émotion et de sensations, la danse orientale, unique en son genre, est une richesse artistique et un patrimoine culturel indéniable, véritable atout pour le corps féminin, éveillant une part de sensualité plus ou moins retenue chez la femme. Faisant appel au charme, tous les types de corps s’adaptent à cette chorégraphie. La danse orientale est d’autant plus épanouissante pour le corps qu’elle le valorise. Entre art, séduction et performance sportive, toutes les parties du corps sont en mouvement continu. Tellement féminine, la danse fait revivre la gent féminine de tous les âges et de toutes les origines faisant à la fois la joie des femmes et des spectateurs. De façon générale, cette danse, raffinée, innovatrice à l’opposé des clichés passéistes, se caractérise par la souplesse et la sensualité des mouvements. Elle a cette puissance de s’accorder délicatement avec le corps sailli de la femme puisque sollicitant souplesse et tonicité du buste, des épaules, des bras, des mains et du bassin, mais surtout du ventre. Ces immenses mouvements de va et vient du bassin portent plusieurs à croire qu’une danseuse doit avoir de la ligne, et un ventre bien aplati. Bien que la plupart des danseuses soient sveltes, il y en a d’autres aussi habiles et douées mais toujours pulpeuses. L’essentiel n’est pas la rondeur mais la souplesse, la grâce et la sensualité qu’elle peut apporter.
Vêtements bien singuliers et riches en couleurs
Leurs vêtements sont bien singuliers dans tous leurs détails, riches en couleurs et de très bonne qualité. Par-dessus, les danseuses orientales portent des voiles colorés transparents en plus d’un soutien-gorge recouvert de paillettes et de franges. En général, la partie du ventre est dénudée pour afficher les vibrations ondulées du bassin et la souplesse du mouvement. On trouve souvent les danseuses accompagnées de sagattes au bout des doigts (cymbalettes). Quant aux bijoux, ils ne sont pas sophistiqués, seulement quelques accessoires ornant le haut du bras et des boucles d’oreilles. Mais leur maquillage est en revanche très développé. Du khôl autour des yeux, des tatouages au henné sur les mains, les pieds. Pour leur chevelure, elles ont tendance à la laisser flottante.
Le début toujours au “Casino Opéra”
C’est avec Badia Masabni, une danseuse syrienne, que la notoriété de la danse orientale connaît un élan imprévisible. Elle ouvre deux nouveaux casinos renouvelant ainsi l’image de la danse orientale, et offrant de la même façon un spectacle de qualité aux Egyptiens. Elle confère alors à la danse orientale une toute autre dimension à l’aide de décors spectaculaires, de nouveaux mouvements de danses inspirés de la danse classique et une technique plus élaborée, le tout enrichi par des accessoires et des costumes féeriques et envoûtants. Au «Casino Opéra» les célèbres danseuses Samia Gamal et Tahiya Carioca y ont fait leurs premières scènes. Même la légendaire Naïma Akef est passée un temps par ce casino combinant son propre style issu d’une formation circassienne à celui du mentor. Dans les années 60, la création par Mahmoud et Ali Reda et Farida Fahmy de la troupe Reda en Egypte donne un élan majeur à la recherche artistique portant sur le folklorique et le Raks Sharki (danse orientale). Cette période est également marquée par l’entrée en scène de grandes danseuses telles que Souheir Zaki, Fifi Abdo, Nagwa Fouad et Lucy. La fabuleuse
Samia Gamal, la première à faire…
La fabuleuse Samia Gamal, surnommée le “pavillon dansant”, fut et restera la plus grande légende de la danse orientale. Elle était pionnière dans son art. Elle était la 1ère à danser avec un voile pour l’aider à améliorer la fluidité de ses bras. Au début de la scène elle l’utilise, ensuite elle l’abandonne au milieu de sa chorégraphie. Ainsi, naquit cette pratique très courante aujourd’hui en danse orientale. Egalement, elle était la 1ère à porter un bijou dans son nombril et à porter des talons hauts sur scène.
Tahiya Carioca, la reine de la danse du ventre
Une autre danseuse non moins légendaire que Samia Gamal, Tahiya Carioca dont la grande cantatrice Oum Kalthoum disait “qu’elle est une artiste pouvant faire chanter son corps”. Connue pour son innovation tant par ses mouvements que par ses costumes, Carioca possédait une présence sur scène, une sensualité suave et une grande classe qui font d’elle la reine de la danse orientale. Son style très raffiné, doux et féminin était ponctué de plusieurs mouvements faits dans très peu d’espace. C’est d’elle que la plupart des danseuses actuelles ont appris à s’imprégner des vraies règles de la danse orientale.
Une vision toujours conservatrice
La vision de la société égyptienne, vachement conservatrice, quant à la danse en général et à la danseuse en particulier est teintée de quelques carences. Bien que l’Egypte soit le berceau de la danse orientale, les danseuses sont mal vues par la société. Les Egyptiens ne considèrent pas la danse orientale comme une profession respectable. La plupart d’entre elles se trouvent dans un “cercle noir”. La télévision d’État égyptienne ne diffusait que récemment des scènes de danse orientale. Un projet de création d’un Institut d’Etat afin d’y former des danseurs en Egypte fut lourdement attaqué car, d’après la censure et quelques responsables conservateurs, il «compromet sérieusement les traditions de la société égyptienne et viole clairement les mœurs». La question alors : qui assume la responsabilité de cette vision exiguë? La danseuse ? La société ? Ou bien les traditions elles mêmes ???