Dans son premier roman Espèces dangereuses, Sergueï Shikalov mêle mémoire intime et critique sociale pour raconter une Russie oubliée, progressiste et pleine d’espoir. À travers les voix de ceux qu’on a fait taire, il ressuscite un rêve collectif : celui d’un monde plus libre, plus juste, désormais effacé par la répression et l’oubli.
Par Marwa Mourad
De quoi il s’agit?
Un soir d’automne, un trentenaire russe est visité par des fantômes. Fantômes de sa jeunesse et de toutes les autres : celle et ceux qui crurent un temps que leur pays ne les rangeait plus dans la catégorie des espèces dangereuses, des “pervers sexuels”.
Il décrit une Russie peu connue des Occidentaux, une Russie progressiste qui, le temps d’une décennie, a cru aux droits de l’homme et à l’amour libre. Il évoque l’espoir frémissant des jeunes Russes de ne plus faire semblant, d’être enfin acceptés par leur famille et par la “patrie”. Pouvoir se tenir la main dans les rues de Moscou, oser embrasser son amoureux lors du premier concert de Mylène Farmer à Saint-Pétersbourg, s’éblouir de l’Europe et des United States, ouvrir grand les yeux sur les opportunités d’un monde nouveau.
Espèces dangereuses est le récit polyphonique d’un rêve auquel “on” a cru ensemble. “On”, ce pronom qui n’existait pas dans sa jeunesse russe mais qui lui permet aujourd’hui d’y retourner en y emmenant tous les autres : les disparus, les oubliés, les gommés.
Quel en est le but ?
Le but de « Espèces dangereuses » est de pousser le lecteur à réfléchir sur la nature humaine, sa place dans le monde, et l’impact destructeur de ses actions. À travers une fiction provocatrice, Sergueï Shikalov interroge l’évolution de notre société, nos rapports à l’environnement, à la science et aux autres espèces vivantes. En présentant l’humanité comme une espèce potentiellement nuisible, l’auteur invite à une remise en question profonde : sommes-nous encore capables de vivre en harmonie avec notre planète ? Le livre agit ainsi comme un miroir critique de notre époque, mêlant satire, philosophie et anticipation, pour éveiller les consciences et susciter un débat sur notre avenir collectif.
Qui est Sergueï Shikalov ?
Sergueï Shikalov est né en Russie en 1986, d’une mère biélorusse et d’un père russe. Passionné par la culture française dès l’adolescence, il poursuit ses études supérieures en linguistique et traductologie à Moscou avant de s’installer en France en 2016.
Sergueï Shikalov signe un récit en français à la fois intime et politique, retraçant le processus implacable de restriction des droits de l’homme et de la liberté d’expression en Russie.
Sergueï Shikalov est un écrivain français d’origine russo-biélorusse. Il a fait des études de linguistique comparative en Russie et aux États-Unis et vit en France depuis 2016. Son premier roman, « Espèces dangereuses « (Seuil, 2024), suscitant de des critiques élogieuses dans les médias français, a remporté le prix André Malraux dans la catégorie Fiction engagée.