Clin d’oeil
Par : Samir Abdel Ghany

Au cœur d’Héliopolis, là où les couches du temps s’empilent comme des strates de lumière, se niche la Galerie Chadicor, fragile et puissante à la fois, semblable à une bougie qui refuse obstinément de s’éteindre. Elle n’est pas seulement un lieu où l’on expose des toiles : elle est une respiration ancienne, un écho fidèle d’un temps où l’art accompagnait le quotidien, où les familles cherchaient dans la beauté un chemin vers l’élévation, et non un luxe réservé aux privilégiés.
Dans un monde qui change de visage trop vite, Chadicor a choisi de demeurer, de garder vivante sa mission première : préserver l’esprit du beau, offrir à la ville une oasis où la création reste un acte sincère.
À la tête de cette résistance douce mais inflexible, se tient Adel Sabet Attallah, critique et artiste, mais surtout veilleur infatigable. Il a donné à ce lieu son temps, sa passion, parfois même sa fatigue ; il en a été la voix, la mémoire et le souffle.
À ses côtés, son fils Rafik, compagnon indéfectible de cette lutte silencieuse, avance à ses côtés comme on avance contre la tempête : avec foi, courage et un sens profond de l’héritage. Ensemble, ils défient les mirages et les faux éclats, luttant contre le vacarme de l’art marchand, contre l’éphémère facile.



CarC n’a jamais été un sanctuaire pour initiés, ni une vitrine qui cherche les feux de la rampe. C’est une maison ouverte, un refuge pour les créateurs authentiques, un havre pour ceux qui désirent une œuvre vraie, à portée de cœur comme à portée de main. Durant des décennies, la galerie a offert des œuvres de maîtres à des prix qui respectaient la dignité de la classe moyenne, préservant cet espace fragile où le goût peut encore respirer.

L’histoire de Chadicor est celle d’une fidélité. Entre ses murs s’est écrite la mémoire d’une génération de rêveurs, de peintres, de sculpteurs qui y ont trouvé un espace rare : celui de la liberté.
Adel Sabet, au centre de la salle, n’était pas seulement un directeur : il était un passeur. Il accueillait, écoutait, orientait, révélait. Il offrait à chaque jeune talent non pas un jugement, mais une lumière.
Aujourd’hui, parler de Chadicor, c’est évoquer un héritage vivant : une flamme qui illumine encore la nuit du temps. C’est évoquer un homme qui a considéré la beauté comme un destin à défendre, la création comme un devoir, la vérité comme un souffle nécessaire. C’est raconter l’histoire d’un rêve qui n’a jamais capitulé.
Galerie Chadicor… plus qu’un lieu, une âme. Plus qu’une galerie, une mémoire. Plus qu’une flamme, un symbole que l’on espère éternel.
Hommage au père, Adel Sabet, gardien du beau.
Hommage au fils, Rafik, qui poursuit la marche et veille à ce que la lumière jamais ne vacille.





