Né le 28 mai 1949, Hassan Al-Charq est originaire du gouvernorat de Minia. Son père était un boucher et ce dernier souhaitait que son fils lui succède. Hassan est le fils aîné de ses frères. Il a passé son enfance dans son village à l’est du Nil et au cœur de la montagne, entourée de mausolées. Il passait ses jours à écouter les louanges des fidèles à Allah, l’histoire d’Al-Hélali, les chansons de mariage, de récolte, les chants populaires communément appelés « Mawâwîl », autant de chansons qui remplissent les cœurs des pauvres de satisfaction. Il avait de grands rêves et nul ne croyait qu’il allait un jour les réaliser, mais il l’a fait. Il m’a reçu chez lui, dans son musée, à cœur ouvert. Et, il s’est montré généreux en me proposant deux heures d’étonnement et de fascination face à ce grand artiste. Entouré d’un millier d’œuvres, j’ai été ébahi. Son style est particulier : il est surtout spontané, naturel et simple. Cette simplicité et cette spontanéité t’attirent vers l’univers des Mille et une nuits et les histoires des grands-mères.
Les yeux détecteurs d’un enseignant
«J’ai été fortement encouragé par mon enseignant de sciences au cycle primaire, après avoir vu mes dessins sur les murs et les bancs. Alors, il m’a poussé à dessiner les moyens d’illustrations en classe », se souvient Hassan Al-Charq. Ayant grandi entre village et ville, Al-Charq s’est inspiré de son environnement : le Nil, la verdure, les maisons qui prennent la forme de voûte. Ils dessinent sur les murs tantôt à la craie et tantôt au style. Puis, il a commencé à s’offrir des carnets en papier pour dessiner. Hassan Al-Charq n’a pas fait des études de dessins académiques, mais sa passion pour l’art ne l’a pas empêché de poursuivre son chemin avec insistance. A ses débuts, par manque de papier, il se servait du papier kraft d’emballage de la viande dans la boucherie paternelle, en plus de l’unique pinceau qu’il en avait. Il sortait de l’ordinaire : un pinceau en rameau de palmiers. Et, les couleurs dont il se sert proviennent de la nature, plus précisément de l’épicier: du curcuma, de la poudre pour blanchir le linge, etc. Bref, des produits à 100% naturels. Et il se mettait donc à griffonner.
Une rencontre qui change sa vie
Il commence ensuite son parcours, après être resté captif par son village où il a passé près de 25 ans. Même après les années, Hassan Al-Charq continue à utiliser sa palette de couleurs très particulières : ses dessins continuent aussi à susciter fascination et émotion. Il a exposé ses œuvres un peu partout, même au Louvre. Al-Charq commence sa vraie carrière lorsqu’une orientaliste allemande a visité Minia en 1985. Elle lui ouvre la porte royale du succès et de la réussite, au point qu’il la considère comme étant son ange gardienne. Découvrant ses œuvres, l’Allemande est fascinée et l’aide à tenir sa première exposition au Caire. A partir de ce moment, il connaît la célébrité et se fait reconnaître dans de nombreux pays. En 1991, il expose ses œuvres en Allemagne à Munich, puis en France au Louvre, ensuite en Suisse. Il a commencé à se faire une véritable réputation à l’échelle nationale et internationale. D’ailleurs, les Allemands ont publié un ouvrage sur l’art intitulé « Hassan Al-Charq et la campagne égyptienne ». Il est publié dans les langues arabe, anglaise et allemande.
L’enfance, source intarissable d’inspiration et d’émotions
« Mon enfance est ma source intarissable d’inspiration et d’émotions. Ma grand-mère m’a inspiré par ses histoires, les jeux pour enfants de la Haute-Egypte, nos habitudes, nos coutumes, notre particularité, le génie de l’environnement dans lequel j’ai grandi ont contribué pleinement à forger mon esprit d’artiste. J’ai passé mon enfance à écouter les chanteurs populaires raconter à la musique d’el-rabâba (un instrument à cordes populaire) les histoires d’amour, de trahison, de retrouvailles, etc. J’avais l’habitude d’incarner leurs histoires par mon pinceau, leurs chants m’ont inspiré et donné une âme égyptienne authentique », avoue-t-il. Sans son ange gardienne, Al-Charq pense qu’il allait être un fonctionnaire ordinaire qui va au travail et rentre chez lui paisiblement, mais rien de particulier. Aujourd’hui, il est fier de cette rencontre qui lui a permis d’avoir son propre musée, de participer à des expositions en Egypte et ailleurs. « Je me suis remarquablement inspiré de l’histoire des Mille et une nuits dans la plupart de mes œuvres, outre le quotidien dans les villages égyptiens : tous les détails m’ont servi à l’instar des paysans, des soirées de mariage, des soirées de henné. Je pense foncièrement que le retour au patrimoine, à nos origines et à notre héritage est l’unique voie vers la célébrité à l’échelle mondiale », martèle-t-il.
Ambassadeur de son pays en djellaba
Après des années, Al-Charq a réussi à mettre en place son musée dans son village natal en Haute-Egypte. « J’ai créé ce musée sans aucune aide sur une superficie de 1.800 mètres carrés pour obtenir trois salles d’exposition. J’ai de même appris à échanger mes tableaux avec ceux d’artistes étrangers. Mon musée comprend près de mille œuvres. Il est le cap de touristes et d’amateurs d’art», indique-t-il. Al-Charq est parvenu à devenir l’ambassadeur de son pays à l’étranger et à se créer un univers à part entière. « En dépit de mes voyages et de mes expositions dans différents pays du monde et en présence de grandes personnalités et de grands responsables, j’ai toujours tenu à porter l’habit rustique égyptien : la djellaba », se réjouit le saïdi. Vingt-six ans, tel est son parcours artistique. Quarante mémoires de master ont été consacrées à son art. Son message à la jeunesse est le suivant: quand la vie déprime, il faut savoir que la grandeur des habitants de la Haute-Egypte et leur capacité à surmonter les obstacles et à triompher sont la clé magique