Il était une fois, dans un marché ensoleillé du sud, un étal coloré où reposaient, côte à côte sans jamais se parler, une figue violette et une noix de coco.
La figue, toute pulpe et parfum, douce et sucrée, était originaire des collines méditerranéennes. Elle aimait le soleil, les poètes, et les mains tendres. La noix de coco, elle, venue des îles lointaines, portait une coque rugueuse, un silence océanique, et cachait en son cœur une eau limpide et fraîche.
Tout les séparait.
Elle, fragile, fondait sous la langue ;
Lui, dur, résistant, insulaire.
Mais le vent d’été les rapprocha.
Un jour, alors que la marchande s’absenta, un rayon de lumière glissa sur la figue, qui tomba tout contre la noix de coco. Ce contact déclencha un frisson. Elle rougit davantage ; lui en perdit un peu de sa rigidité. Ils se regardèrent enfin.
La figue trouva en lui un mystère fascinant, une lenteur apaisante.
La noix de coco fut émue par sa tendresse, sa générosité, cette manière de se livrer sans peur.
Ils se parlèrent de leurs origines, de leurs rêves impossibles. Et au fil des jours, ce qui n’était qu’un accident devint évidence : ils s’aimaient.
Bien sûr, tous les autres fruits se moquaient :
— “Une figue et une noix de coco ? Quelle idée !”
— “Elle pourrira avant qu’il ne s’ouvre !”
Mais les deux s’aimaient à contre-saison, à contre-courant, et refusèrent de se laisser flétrir par les jugements.
Alors, une nuit étoilée, ils prirent un risque fou : se mélanger, s’unir, se transformer.
Le miracle eut lieu dans le silence du jardin. Une union lente, naturelle, patiente.
Et de leur amour naquit un fruit nouveau, que personne n’avait encore vu :
la figcoco.
Petite sphère au cœur moelleux, à la peau légèrement craquelée, dégageant un parfum à la fois floral et boisé. Son goût ?
Un secret : le velouté sucré de la figue, adouci par la fraîcheur lactée de la coco.
Depuis ce jour, on raconte aux enfants du verger que l’amour ne suit jamais les règles du panier, et que parfois, de deux contraires peut naître un monde nouveau, plus savoureux que tous les autres.
Car le fruit de l’impossible est aussi le plus rare.