Milayah Laff signifie littéralement « drap enveloppant ». A l’origine, la Milayah était un grand châle noir utilisé comme manteau par les femmes qui s’enroulaient dedans avant de sortir dans la rue. La Milayah Laff était la tenue vestimentaire qui caractérisait la femme égyptienne dans la première moitié du siècle révolu à tel point qu’elle était devenue l’habit quasi commun de Bint el-Balad (la fille du pays) dans les quartiers populaires partout en Egypte
La plupart des comédiennes portèrent la Milayah Laff dans des œuvres de fiction télévisuelle, dramatiques et cinématographiques dont notamment Tahiya Karioka dans les films Jeunesse d’une femme (Shabab Imr’aa), El-Me’allema (la contremaîtresse) et Samara. Pour attirer le regard du public lors du festival du cinéma en 1956, Tahia Karioka a porté une Milayah Laff. La comédienne Hind Rostom a porté également ce grand châle noir dans son film Touha ainsi que Chadia dans son film Zuqaq Al-Midaqq entre autres comédiennes. On raconte que la Milayah Laff a fait à l’origine son apparition parmi les femmes romaines avant que cette tenue vestimentaire féminine ne se répande dans la région de la Méditerranée en commençant par Egypte à l’époque ottomane où elle était en usage à Alexandrie, puis au Caire avant de gagner les autres gouvernorats du pays. La Milayah Laff dans les ruelles du Caire Le style d’Alexandrie se caractérise par une robe courte et colorée et le style du Caire par une robe traditionnelle. Dans les années 30 et jusqu’au début des années 60 du 20ème siècle, il était très commun de voir des femmes de tout âge portant la Milayah Laff dans les rues et ruelles du Caire et des autres villes. La Milayah était faite d’une crèpe noire épaisse et la femme portait pardessus la robe pseudo-occidentale à la mode à l’époque. La Milayah n’était pas seulement portée par les femmes des classes ouvrières ou ayant de faibles revenus, elle était aussi une tradition vestimentaire des femmes bien nanties, comme les épouses et les filles de riches marchands. Son introduction dans la troupe Réda La Milayah Laff est probablement la descendante de la « habarah » qui était porté dans l’Empire Ottoman au 19ème siècle. Le nom « Habarah » était donné à une large tenue surtout de soie, touchant le sol, que les femmes bien nanties portaient par-dessus leurs costumes complets lorsqu’elles quittaient leurs maisons. Edward Lane, dans son livre « The Manners and Customs of Modern Egyptians », décrit au milieu du 19ème siècle la « habarah » comme étant « composée de deux laizes d’une soie noire brillante, chacune de la largeur d’un bras et d’une longueur de trois verges, celles-ci étaient cousues ensemble à la lisière ou près de celle-ci (selon la grandeur de la personne). La couture courait horizontalement, selon la façon dont le vêtement était porté ». Il continue en disant que les femmes qui n’étaient pas issues des classes très pauvres utilisaient surtout une tenue semblable à la « habarah », faite de coton tissé en damiers ou en rayures entrecroisées bleues et blanches, appelé « Milayah », d’où le nom de Milayah. On ne sait pas quand ni combien de temps il a fallu pour que la « habarah » évolue et devienne la Milayah Laff telle que nous la connaissons. C’était un surtout enveloppant porté par Bint Al-balad (littéralement « fille du pays »). Un terme donné aux femmes issues de groupes sociaux vivant dans les communautés urbaines les plus anciennes des régions du Delta et du Canal. Dans les années 30, 40 et 50 et au début des années 60 du 20ème siècle, il était très commun de voir des femmes de touts âges porter la Milayah Laff dans les rues et ruelles du Caire et d’autres villes. Les femmes portaient aussi des gallabiyahs semblables à celles des hommes mais taillées et ajustées à la silhouette féminine. Le type de matériaux utilisé pour la Milayah va du simple coton à un mélange de soie et de coton, ou de soie et de laine de haute qualité. Une évolution plus moderne Au fil du temps, la Milayah a évolué vers une version plus courte mesurant approximativement 2.75 m de long et 1.50 de large. La Milayah, et le burqu’ (voile du visage fait en matériaux froissés légers ou de type dentelle) étaient fabriquées dans les usines de textile et vendues en prêt-à-porter. Le burqu’a progressivement disparu avant que les femmes ne cessent de porter la Milayah. Ce sont les jeunes générations qui ont d’abord abandonné la Milayah, bien avant leurs aînées, beaucoup plus réticentes à abandonner une tradition bien ancrée. Bint el-balad se distingue comme étant une personne intelligente, vive, honnête, charmante et, surtout, fiable. De nos jours encore, une femme qui présente ces caractéristiques est reconnue comme étant une vraie bint balad. Cependant, comme dans toute société, il y a certaines exceptions à la règle et il existe toujours des femmes qui dévient de la norme. Bint el balad se trouve dans le répertoire de la troupe Reda Un des plus importants éléments trompeurs conduisant à une idée erronée de la Milayah est la « danse Milayah » qui était portée par les danseuses étrangères faisant croire que leur danse est une danse traditionnelle. En fait, la danse de bint al-balad avec la Milayah était à l’origine créée par la Troupe Reda pour les besoins de la danse théâtrale. Mahmoud Reda, le fondateur de la troupe, s’est inspiré des personnages et de l’environnement qui l’ont influencé durant sa jeunesse. Les danses représentaient ses propres impressions sur les coutumes et les traditions de la société dans laquelle il a grandi et la culture dans laquelle il était i m m e r g é . Plusieurs des personnages qu’il transposait dans ses danses étaient typiques, des gens que l’on retrouvait dans les vieux quartiers du Caire. Les personnages qu’il dépeignait possédaient des qualités de mouvement qui pouvaient être exprimées par la danse. C’était la première fois que ces personnages soient ainsi créés pour la scène.