Prénom : Saja
Nom : Mohamed
Âge : 13 ans
Année scolaire : Première préparatoire
Ecole : Saint Vincent de Paul
La vie a besoin d’un peu plus de gentillesse. Un peu moins de vitesse. Un peu plus de générosité. Un peu moins de cupidité. Un peu plus de sourires. Un peu moins de froncements de sourcils. Un peu moins de coups de pied à un homme déjà à terre. Un peu plus de nous. Un peu moins de je. Un peu plus de rires. Un peu moins de pleurs. Un peu plus de fleurs sur le chemin de la vie et moins sur les tombes à la fin du combat de la vie.
Le soleil se leva, la nature se réveilla, et Éran était encore à sa place. Son corps était affalé par terre, les feuilles dans ses mains. Le vent fort n’avait pas osé déplacer les feuilles parce qu’elles portaient les secrets enflammés que tout le monde espérait connaître.
Gaspard le journaliste était pantois qu’Éran ait disparu ainsi, mais il avait un sentiment qui le dérangeait : Éran était parti de lui-même, car la mère d’Éran avait aussi disparu. Il pensait donc que sa mère avait voulu lui annoncer une nouvelle importante et qu’ils avaient quitté la maison pour aller ailleurs.
Le succès que Gaspard avait réalisé avec son intuition permit à la police de trouver le corps d’Éran allongé sur le sommet froid d’une montagne. Mais ils ne le trouvèrent pas seul ; ils découvrirent également le cadavre de sa mère, morte, avec du sang séché qui coulait de sa tête. Ils emmenèrent les deux en direction de l’hôpital.
Gaspard, qui les accompagnait tout au long du trajet, subtilisa les feuilles des mains d’Éran en déclarant qu’il allait les cacher jusqu’à ce qu’il se réveille. Il commença à lire, mot par mot :
“Le 18 février 1940,
Il ne doit pas savoir qu’il est né avec une malédiction qui va le transformer en un ogre qui ne peut rien sentir pendant que la lune embaume son silence et son noir. Il peut tuer, casser ou même faire des actions dont il est irresponsable. Je lui ai construit une cabane au milieu de la forêt, loin de tout le monde, et je vais lui enseigner que quand la nuit tombe, il se dirige seul vers la cabane. En tout cas, il va tout oublier le matin. Oh, mon Dieu, garde-moi mon petit Éran, c’est la plume de ma vie et l’espoir d’une nouvelle vie envahie de joie.”
Gaspard était choqué de ce qu’il lisait : c’était donc Éran qui tuait tous ces gens le soir, et le matin, il reprenait le rôle du pauvre détective qui voulait sauver les gens. Il fouilla dans les feuilles jaunies et noircies par la cendre et lut :
“Le 20 mars 1940,
Je ne sais pas quoi faire, j’ai perdu le contrôle de mon fils. Maintenant, il ne va plus vers la cabane, mais il va vers les gens, et il tue sans raison, et le matin, à cause de son travail de détective, il essaie de résoudre le mystère. Mais mon pauvre Éran, tu t’es tellement trompé, car tu ne pourras jamais trouver la solution, car c’est toi qui fais tout ça. Je lui mettais une boîte qui contenait de la scopolamine pour que si quelqu’un le remarquait, il oublie tout de suite.”
“Toi, tu es un sacré détective. Tu tues et tu essaies de trouver la solution”, murmura Gaspard dans la voiture où il était assis à côté de lui en direction de l’hôpital. Il continua sa lecture :
“Le 29 mai 2000,
Je ne sais pas ce que j’ai fait, j’ai tué la femme de mon fils. Elle allait découvrir la vérité et la dire à Éran. C’était donc la seule chose que je devais faire : la tuer. Je m’excuse, mon amour, mais je devais le faire. Si tu lis ces feuilles maintenant, alors je suis au ciel. Pardonne-moi.”
“Je ne pouvais jamais croire tout ça. Éran doit se réveiller et lire chaque mot écrit avec le sang de sa mère.”
À leur arrivée à l’hôpital, les docteurs déclarèrent que sa mère était complètement morte, mais Éran se réveilla, et ils purent entrer le voir. Gaspard fut le premier à entrer. Il donna les feuilles à Éran et lui dit : “Lis la vérité cachée. Moi, je l’ai sue, mais toi, tu vas être choqué.”
Éran ne comprenait rien et lut toutes les feuilles. Ses yeux ne pouvaient pas croire ce qu’il lisait. Les feuilles tombèrent de sa main et il cria : “Je m’excuse, mais ce n’est pas de ma faute. Je ne sais pas qui je suis, un dragon en forme d’humain, ou est-ce la vie qui me déteste ?” Soudain, il devint silencieux. Les docteurs l’examinèrent et découvrirent qu’il était tombé dans le coma.
Six ans après, Éran se réveilla et, en ouvrant les yeux, il trouva sa mère à côté de lui. Il lui dit : “Tu étais morte, n’est-ce pas ? Et c’était moi qui tuais les gens, et c’était moi l’ogre des gens ?” “Chut ! Tu es encore éreinté, mon amour. C’est ma troisième vie, car cette malédiction ne nous permettra jamais de mourir. Maintenant, tu dois dormir.”
Et alors que la mélodie ‘Ala nanita nana’ berçait à nouveau son sommeil, Éran comprit l’horrible vérité : il n’était pas le détective, mais le monstre. Il n’était pas le chasseur, mais la proie de sa propre malédiction. Sa mère, éternelle gardienne de ce secret maudit, veillerait sur lui pour l’éternité, dans un cycle sans fin de meurtres et d’oubli.
C’est ça la vie : du gain et de la perte. Une porte qui s’ouvre et une porte qui se ferme. Des corps qui renaissent et des corps qui retournent à la terre. Des fleurs qui éclosent et des fleurs qui se fanent. Une vie qui commence et une vie qui s’achève.
Fin