Fini la série que l’on dévore jusqu’à 3h du matin. Aujourd’hui, les écouteurs sont le nouvel écran. Une voix, un fond sonore, et le cerveau s’emballe. Les podcasts de fiction ou de faits divers, ces séries audio qui nous plongent dans des mondes imaginaires ou réels, connaissent un succès grandissant. Mais pourquoi ces histoires sans images nous captivent-elles autant ?
Par Ghada Choucri
Le pouvoir de l’imagination
L’attrait principal du podcast de fiction est sa capacité à stimuler notre imagination. Contrairement au cinéma ou à la télévision, il ne nous donne pas tout, il nous suggère. Sans images, l’auditeur est libre de créer les décors, les visages des personnages, leurs expressions. C’est une expérience profondément personnelle et intime.
Le triomphe de la narration audio : Entre fiction et réalité
Le monde du podcast est en pleine effervescence, porté par une soif d’histoires qui ne cesse de croître. Mais au-delà des débats ou des interviews, deux genres narratifs se distinguent par leur capacité à captiver l’auditeur et à le transporter : le podcast de fiction et le podcast de faits divers dit aussi “true crime” (crimes réels). Si le premier nous invite à l’évasion, le second nous plonge dans les méandres les plus sombres de la réalité.
La naissance d’un phénomène
L’essor de ces deux genres n’est pas un hasard. Il est intimement lié à la démocratisation de l’accès aux technologies d’enregistrement et de diffusion, mais surtout à l’influence d’un podcast qui a tout changé : “Serial”. Lancé en 2014, ce podcast américain, qui a enquêté sur une affaire criminelle réelle non résolue, a créé un véritable phénomène de société. Il a prouvé au grand public que l’audio pouvait raconter des histoires complexes avec le même suspense qu’une série télévisée. “Serial” a ouvert la voie à une vague de podcasts de true crime, mais a également montré la voie pour des formats de fiction.
Le podcast de fiction : Quand le son fait son cinéma
Le podcast de fiction est l’héritier direct du feuilleton radiophonique d’antan, mais avec une touche de modernité. Il utilise le sound design, la musique et le jeu d’acteur pour créer des univers entiers dans l’esprit de l’auditeur. C’est l’art de raconter une histoire sans aucune image, faisant de l’auditeur le co-créateur de l’univers narratif. Voici quelques exemples internationaux : “L’Effondrement”, il s’agit d’un succès français qui plonge l’auditeur dans une série d’histoires courtes et angoissantes se déroulant dans un futur proche. Le réalisme du sound design y est saisissant. Le second est “Ars Paradoxica”. Un podcast de science-fiction américain qui suit une scientifique accidentellement transportée dans le passé et recrutée par une agence gouvernementale. Une narration complexe et des dialogues captivants en font un incontournable du genre.
La puissance de la narration sonore
Ce qui rend ces récits si immersifs, c’est la qualité du sound design. Le son n’est pas qu’un simple accompagnement, il est un personnage à part entière. Le bruit d’une porte qui claque, un murmure dans le lointain, une musique angoissante… Ces éléments construisent l’ambiance et nous plongent directement dans l’action.
Le format audio offre également une proximité unique. La voix des personnages est directement dans nos oreilles, créant un sentiment d’intimité rare. On s’attache plus facilement aux personnages, on vit leurs émotions de l’intérieur.
Une évasion du quotidien
Le podcast de fiction s’écoute partout et tout le temps : dans les transports, en faisant le ménage, en marchant. Il s’intègre parfaitement à nos modes de vie, nous permettant de nous évader sans être scotchés à un écran. Il offre une pause bien méritée dans un monde où nous sommes constamment sollicités par les images.
Ce retour à la narration audio est un peu un retour aux sources, à une époque où l’on se racontait des histoires au coin du feu. Il prouve qu’un bon récit n’a pas besoin d’artifices visuels pour captiver. Et alors que les plateformes de streaming investissent de plus en plus dans ce format, il est clair que l’âge d’or du podcast de fiction ne fait que commencer.
Le “faits divers” : Le frisson du réel
Ce genre de podcast s’appuie sur la fascination humaine pour le mystère et les récits de crimes. Il se distingue par son fondement dans la réalité. Les animateurs, souvent des journalistes ou des passionnés d’enquêtes, retracent des affaires complexes, parfois non résolues. La force de ce genre réside dans son authenticité, le sentiment que chaque détail raconté s’est réellement produit. « My Favorite Murder », est un de ce genre, c’est un podcast américain qui allie humour et horreur, où les deux animatrices racontent des affaires de faits divers tout en créant une communauté d’auditeurs très engagée. Par contre, « Dr. Death », est une série de podcasts qui plonge dans le monde médical pour exposer les actes d’un chirurgien incompétent qui a causé la mort ou la mutilation de plusieurs patients. Le ton de l’enquête journalistique est très présent.
La scène locale en Égypte : Une éclosion de talents
Ces genres narratifs trouvent également un écho en Égypte, où de nombreux créateurs se sont emparés du format pour raconter des histoires. On a en tête de cette liste, Sameh Sanad qui est connu pour ses analyses de cas criminels réels, il a su capter l’attention d’un large public avec son approche détaillée et sa capacité à décortiquer les faits divers. Un autre exemple est celui d’Islam et son podcast « Sandwiches d’Horreur » : Avec un titre évocateur, Islam explore des histoires de crimes et d’événements troublants, en utilisant une narration qui mêle le suspense et le mystère. Alors que Mohamed Taher et son podcast « Lisez l’accident », se distingue par sa capacité à reconstruire des histoires complexes, en se basant sur des faits divers et des enquêtes qui ont marqué l’opinion publique égyptienne.
Que ce soit à travers les mondes imaginaires des fictions ou les affaires glaçantes des crimes réels, ces podcasts prouvent que la voix et le son sont des outils puissants pour raconter des histoires. Et avec l’émergence de nouveaux talents sur la scène locale, il est clair que ce paysage audio est en pleine expansion.