Le président américain a annoncé hier mardi vouloir “bannir les fusils d’assaut” après une nouvelle tuerie à Boulder. Mais le projet risque bien de tourner court. L’Amérique encore et tou-jours face à ses vieux démons. Le débat sur la prolifération des armes est revenu brutalement sur le devant de la scène, après une nouvelle tuerie surve-nue lundi à Boulder dans le Colorado. Dix personnes sont mortes dans l’attaque d’un supermarché par un jeune homme de 21 ans présenté comme “asocial” et “paranoïaque”. Un massacre qui intervient seulement six jours après une précédente fusillade dans des salons de massage asiatiques d’Atlanta en Géorgie, où huit personnes ont été abat-tues, selon l’Express. Trois ans après la tuerie de Parkland, Joe Biden souhaite limiter la circulation des armes. Une mission difficile sans majorité nette au Sénat. Le 14 février 2018, Nikolas Cruz, 19 ans, pénètre dans son ancien lycée de Parkland, en Floride, un fusil semiautomatique AR-15 à la main. Il ouvre le feu et tue 17 personnes avec cette arme achetée en toute légalité malgré ses antécédents psy-chiatriques. À l’époque, l’évènement suscite une onde de choc à travers les États-Unis. Plusieurs cen-taines de milliers de jeunes, à Washington et dans plus de 800 villes du pays, deman-dent un renforcement du contrôle des armes. Sans succès. La Floride autorise même, peu après, les enseignants à en avoir une en classe. Trois ans plus tard, la question du contrôle des armes à feu est donc toujours ouverte. Dimanche, le président américain Joe Biden a appelé le Congrès à agir “maintenant” pour limiter leur circu-lation dans le pays. “Cette administration n’attendra pas la prochaine fusillade de masse” pour entendre les appels à agir, a affirmé le président démocrate dans une déclaration. Joe Biden souhaite agir sur deux aspects : la vérification des antécédents des acheteurs “pour toutes les ventes d’armes”. Et l’interdiction des fusils d’assaut ainsi que des chargeurs à haute capacité. “Nous allons promulguer ces lois et d’autres lois qui sau-veront des vies”, a ajouté Nancy Pelosi, la présidente de la Chambre des représent-ants, promettant d’”amener les avancées qu’exigent et méritent les habitants de Parkland et le peuple améri-cain”. La mission est plus que délicate. Les démocrates détiennent désormais une très courte majorité au Sénat, mais ils auront besoin d’au moins dix républicains pour faire adopter ces lois, ce qui sem-ble actuellement dif-ficile. Les adminis-trations américaines suc-cessives ont été impuis-santes à endiguer la multi-plication des tueries de masse qui frappent régu-lièrement les écoles améric-aines, les centres commer-ciaux, les entreprises ou les lieux de culte. En dépit d’une mobilisation inédite des lycéens de Parkland pour un contrôle plus sévère des ventes d’armes, le prési-dent Donald Trump avait alors refusé d’envisager l’interdiction des fusils d’assaut. En août 2019, deux nou-velles fusillades à El Paso et Dayton, ayant causé la mort de 31 personnes, avaient déclenché de nouveaux débats sur l’avenir du port d’armes en Amérique. La puissante NRA (National rifle association), le lobby pro-armes, “s’oppose à toute loi renforçant leur contrôle”, avait prévenu son vice-pré-sident Wayne LaPierre. Seules les initiatives locales réussissent parfois à aboutir. Après une énième fusil-lade, la Virginie a renforcé l’examen des antécé-dents judiciaires des ache-teurs début 2020. Elle a également interdit les chargeurs de plus de dix car-touches, l’achat de plus d’une arme par mois et rétablit le droit des autorités locales à interdire le port d’armes dans les espaces publics. La mise en place de ces mesures avait provoqué une levée de boucliers dans la population. “Ces dernières décennies, les politiques ont essayé de faire passer des lois qui ren-dent plus difficile pour les citoyens respectueux de la loi d’acheter des armes à feu. On est sur une mauvaise pente. C’est notre droit con-stitutionnel, que Dieu nous a donné, de nous armer”, esti-mait Brooks, 24 ans, lors d’une manifestation à Richmond.