Al-Akhbar
Par Samir Farag
Chaque année, le mois de Ramadan fait réveiller en nous de longs souvenirs avec sa spiritualité et ses rites. Mais, le 10 Ramadan reste un jour qui a une saveur particulière. Je le considère comme étant le meilleur jour de ma vie. C’est le jour tant attendu par des civils et des militaires pendant près de six années complètes après la défaite de 1967. Une défaite qui avait été suivie par l’occupation entière du Sinaï par Israël. Nous avions perdu la plupart de nos armes et de nos équipements. Et nous voyons le drapeau israélien hissé sur la rive Est du Canal de Suez, alors que sur la rive Ouest, nous attendions le moment propice pour traverser le Canal et récupérer notre terre. Pour réaliser notre objectif, nous avons mis en place un plan d’entraînement et de formation pendant six années complètes et continues. Une patrouille entière allait s’entraîner à traverser des obstacles sur l’eau dans la région d’Al-Khatatba sur l’une des branches du Nil. Nous nous entraînions également au lac du Fayoum nuit et jour, pour le traverser en utilisant les nouveaux véhicules blindés amphibies, avec des exercices de tir au centre du lac, parallèlement à la réorganisation et à l’armement des Forces armées : la deuxième et troisième armées de campagne, ainsi que les forces de défense aérienne. Puis est venu le 6 Octobre 1973 qui coïncidait avec le 10 Ramadan de l’année 1393 de l’Hégire. J’étais au centre du commandement principal, des Forces armées, lorsque le défunt Président Sadate est arrivé, à 12 heures. Il était vêtu de son uniforme militaire, et derrière lui des soldats portant des sandwichs et des jus, et a dit que le Mufti d’Egypte a autorisé les hommes de l’Armée égyptienne à prendre l’iftar avant l’heure du crépuscule, pendant la guerre, en tant que des défenseurs de la patrie, et a demandé à faire véhiculer cette fatwa (avis religieux) à toutes nos forces sur le front.
Quand l’heure a sonné 14h00, la mise en œuvre du plan de guerre a commencé, avec le lancement de la frappe aérienne avec 220 avions, qui ont tous traversé le Canal de Suez, et nous les avons suivis sur les écrans du Centre, tout en réussissant à obtenir de grands résultats, en ciblant tous les objectifs, au point que la deuxième frappe, qui devait être effectuée, si la première n’atteignait pas les résultats escomptés, n’a pas été mise en œuvre. Après cela, les forces ont commencé à traverser le Canal de Suez, dans des petits vaisseaux, en 12 phases, et leurs voix grondaient « Dieu est Le Plus Grand », à chaque pas. Tandis que les informations confirmaient la chute de la ligne Bar-Lev. On apprend en avançant que le drapeau égyptien a été hissé sur la rive Est du Canal de Suez, après avoir vécu la douleur de ne pas le voir pendant six ans.
Nous avons reçu des rapports confirmant que l’Armée a pu repousser toutes les contre-attaques, menées par les forces israéliennes, et au coucher du soleil, des ponts ont été mis en place pour la traversée des chars et de l’artillerie après avoir ouvert des fentes dans la ligne Bar-Lev à l’aide de canons à eau, 12 000 combattants égyptiens étaient sur la rive Est du Canal, vers la fin du jour. Il demeure ainsi le plus beau jour de ma vie, et un symbole de la fierté de l’Egypte et de tous les Egyptiens.





