



Par une soirée tranquille à Al-Qanater, le théâtre devient un miroir de l’âme humaine. Sous les voûtes sobres du palais de la culture, un cri silencieux a été lancé contre l’abîme intérieur, un cri venu d’une scène vibrante d’émotion, où l’art a frôlé l’espoir et désarmé la douleur.
Mardi dernier, dans le cadre de la 32e édition du Festival national des clubs de théâtre, le public du Palais de la Culture d’Al-Qanater El-Khayriya a été profondément ému par la représentation poignante de la pièce « Le vendeur de livres contrefaits », présentée par le club de théâtre du Palais de la Culture de Zagazig. Cette manifestation artistique s’inscrit dans un festival placé sous le patronage du Dr Ahmed Fouad Heno, ministre de la Culture, orchestré par l’Autorité générale des palais de la culture sous la présidence du général Khaled El-Labban, et supervisé par l’écrivain Mohamed Nassef.
Signée par Mohamed Yass (texte), Mohamed Moustafa (dramaturgie) et mise en scène par Ziad Yasser, la pièce suit le parcours intime d’un professeur d’université passionné de lecture, broyé par les pressions d’une vie devenue trop lourde. Sur le point de mettre fin à ses jours, il entame une lutte intérieure féroce. C’est alors qu’apparaît une figure singulière : un mystérieux vendeur de livres falsifiés, incarnation onirique de sa conscience vivante et lucide, qui ravive en lui une dernière flamme d’espoir.
Cette allégorie saisissante du combat contre le désespoir a captivé un public composé de figures culturelles de renom : Samar El-Wazir, directrice générale du théâtre, Mohamed Tayea, directeur du festival, ainsi que les membres du jury, parmi lesquels le Dr Mohamed Zaïma, l’écrivain Saïd Haggag, le metteur en scène Sameh Megahid, le compositeur Dr Walid El-Shehawi, et le Dr Mostafa Hamed. Rabie Awad, directeur du palais hôte, était également présent, entouré de passionnés de théâtre.
À l’issue du spectacle, le metteur en scène Ziad Yasser a exprimé sa gratitude pour cette opportunité rare : « Ce festival est une bouffée d’air pour les artistes amateurs. Avant de me lancer, j’ai longuement étudié l’histoire de ces clubs, car cet espace libre est une école d’expérimentation et d’expression unique en son genre. »
Ahmed Gharib, qui incarne le rôle-titre du vendeur, a livré une performance marquante : « Ce personnage est un rempart mental, une voix intérieure qui tente de détourner l’homme de la chute. Il représente l’étincelle de vie qui persiste même dans l’obscurité. »
Karim Rachwan, dans le rôle du professeur, a décrit le tournant décisif de son personnage : « Il est au bord du gouffre, mais l’apparition de ce vendeur éclaire les zones oubliées de son existence. »
Autour de ce duo central, une équipe soudée a donné chair et souffle au récit : poèmes de Marko Fakhry, musiques de Kamal Otman, chants de Mohamed Selim, accompagnés par les musiciens Saïd Walid, Essam Ihab et Mahmoud Tamer. Les chorégraphies de Mohamed El-Gendy, portées par Naglaa Mahmoud et Walaa Negm, ont apporté une touche visuelle bouleversante. La scénographie a été pensée par Mohamed Hassan, l’éclairage signé Hussein Ali, avec un maquillage subtil et expressif assuré par Farah Wafaei.
Cette pièce s’inscrit dans une programmation riche : 27 représentations venues de tous les coins d’Egypte, réunies grâce aux efforts de la Direction centrale des affaires artistiques (présidée par l’artiste Ahmed El-Shafie) et de la direction générale du théâtre.
Le festival se poursuit le 1er mai avec les pièces de la troupe de Kafr El-Sheikh : « La Malédiction de Zikar », d’après un texte et une mise en scène d’Ibrahim El-Fiqi, suivie de « Wali », inspirée de Sîrat Banî Zuwail de Mohamed Ali Ibrahim, mise en scène par Ahmed Salama.
Ce festival, plus qu’une vitrine, est un foyer vivant où naissent les voix d’une Egypte sensible, engagée, profondément humaine. Et dans ce foyer, “Le vendeur de livres contrefaits” aura laissé une empreinte rare : celle d’une fiction qui redonne foi en la vie — même dans ses heures les plus sombres.