Dans les ruelles animées du Caire, un artisanat ancien continue de prospérer : l’art de la reliure des livres. Dans le quartier du Vieux Caire, l’atmosphère est imprégnée de l’odeur enivrante du cuir et du son des outils traditionnels. C’est ici, au cœur de cette cité chargée d’histoire, que les relieurs égyptiens perpétuent un art ancien qui remonte à des siècles. Gardiens d’un savoir-faire traditionnel transmis de génération en génération, les relieurs des livres façonnent des œuvres d’art uniques en habillant les livres de couvertures magnifiquement décorées. Focus sur cet art millénaire.
Par : Hanaa Khachaba
Seuls quelques-uns connaissent vraiment l’histoire de ces objets anciens. Ils ont vu le jour dans des ateliers où le temps semble s’être arrêté. Ces artisans dévoués perpétuent un art millénaire, transmis de génération en génération. Leurs mains expertes façonnent le cuir, le papier et les ornements avec une précision étonnante. Chaque livre relié est unique, portant en lui le savoir et la sagesse des siècles passés.
A travers les mains habiles des relieurs, les livres prennent vie avec des motifs complexes, des arabesques délicates et des couleurs éclatantes qui racontent l’histoire de l’Egypte et de sa riche culture. Chaque reliure est une œuvre d’art en soi, fusionnant tradition et créativité pour offrir aux lecteurs une expérience visuelle et tactile unique.

Les relieurs égyptiens utilisent des techniques anciennes et des outils traditionnels pour créer des reliures de qualité supérieure, alliant expertise et passion pour le métier. Leur travail minutieux et leur attention aux détails font de chaque livre relié un trésor à chérir et à transmettre aux générations futures.
Leur savoir-faire se transmet de père en fils, de maître à apprenti, dans un souci constant de préserver les techniques et les styles propres à l’artisanat de la reliure. Chaque livre qui passe entre les mains expertes des relieurs est traité avec le plus grand respect et une minutie sans pareille.
Les matériaux de qualité, tels que le cuir finement travaillé et les papiers exquis, sont soigneusement sélectionnés pour garantir une reliure durable et esthétique. Les motifs et les ornements qui décorent les couvertures des livres sont souvent inspirés de l’art islamique et des motifs traditionnels égyptiens, créant des œuvres uniques et empreintes d’une profonde signification culturelle.
Chaque détail, chaque arabesque, chaque couleur est méticuleusement choisi pour sublimer le contenu du livre et en faire un objet de beauté à part entière. Malgré les défis posés par la modernité et la numérisation croissante du monde de l’édition, les relieurs égyptiens demeurent résolus à préserver leur art ancestral. Leur passion pour la reliure des livres et leur engagement à maintenir vivante cette tradition séculaire sont une véritable source d’inspiration pour tous ceux qui apprécient la beauté intemporelle des livres reliés à la main.

A travers leurs créations exceptionnelles, les relieurs égyptiens continuent de célébrer l’art, la culture et l’histoire de l’Egypte, offrant au monde entier un aperçu précieux de leur riche patrimoine. Leur travail méticuleux et leur dévouement inébranlable témoignent de la valeur inestimable de l’art de la reliure des livres, un trésor vivant qui perdurera bien au-delà des pages des livres qu’ils façonnent avec tant de soin et d’amour.
Malgré les défis rencontrés par l’industrie du livre à l’ère numérique, ces artisans passionnéscontinuent de préserver cet art précieux, rappelant au monde la beauté intemporelle de la reliure des livres. Leur dévouement à maintenir cette tradition vivante témoigne de l’importance de préserver le patrimoine culturel et artisanal de l’Egypte pour les générations à venir.
Qu’est-ce que la reliure ?
C’est avec l’apparition du codex, au Ier siècle, que la reliure naît et crée l’objet-livre que nous connaissons encore aujourd’hui. Le codex est en effet un livre constitué d’un ensemble de feuilles pliées formant des cahiers, qui sont ensuite reliés, ce qui le différencie du volume en du livre en rouleau, lit-on sur reliure.pdf (bnf.fr).

Etape nécessaire à la réunion des cahiers écrits et donc à leur lecture, moment indispensable pour la conservation de ces textes, la reliure est un élément fondamental du livre. Elle s’oppose au brochage, qui se caractérise par une couverture directement collée ou cousue au dos du livre, qui n’offre pas la même solidité dans le temps. La reliure peut se résumer techniquement à la couture des cahiers, à la pose de plats rigides ou flexibles, qui ne sont pas solidaires du corps d’ouvrage, et d’un matériau de couvrure des plats.
Ce n’est qu’au XVIIe siècle que le terme de reliure prend le sens de « manière dont un livre est relié »:dans ce sens, la reliure donne alors à voir son histoire, ses évolutions techniques, ses multiples ressorts artistiques, ses originalités de matériaux ou de décors, et ses styles, souvent liés au renom des relieurs.
La reliure reste une réponse à des contraintes, et en premier lieu celle de la commande. En effet, le commanditaire indique au relieur ses désirs de matériaux, de formes et surtout de prix ; le relieur doit répondre à ses demandes à partir de cahiers écrits. L’objet-livre, qu’il soit ordinaire ou précieux, et que nous conservons dans nos bibliothèques, si belles lorsque le dos de nos livres présente une cohérence esthétique, naît de la technique et de l’art du relieur.
La reliure est aussi un art à contempler, quitte à être parfois aujourd’hui dans sa propre contradiction en protégeant « les exemplaires les plus rares d’une enveloppe si précieuse que le lecteur appréhende de s’en emparer et de les ouvrir et envisage encore moins de les lire ».
Techniques minutieuses, un vocabulaire spécifique
Les relieurs reproduisent depuis des siècles les mêmes gestes techniques minutieux et suivent un processus lent, dû en particulier aux temps de séchage et de mise en presse. Il existe de nombreuses variantes d’une même technique, autant que de relieurs qui recherchent des solutions originales en fonction de leur habileté et de leur ingéniosité. Les techniques mises en œuvre pour la confection des reliures sont des indices de datation ou de provenance d’un livre. La reliure emploie un vocabulaire spécifique qui peut la faire apparaître aux novices comme un art complexe, selon classes.bnf.fr

Etapes de reliure
➢ La plaçure : Cette opération sert à préparer le corps d’ouvrage à la couture. Cette étape est importante car elle détermine la qualité finale de la reliure, en particulier la facilité d’ouverture du livre.
➢ La couture : La couture est l’élément maître de la reliure qui permet d’unir les différents cahiers ou feuillets. En reliure artisanale, il existe plusieurs techniques de couture : on peut réaliser une couture sur ficelles, sur rubans ou sur nerfs.
➢ Le corps d’ouvrage : Les opérations entre la couture et la couvrure permettent de travailler sur le corps d’ouvrage cousu avant de lui donner sa parure. Cette étape permet de créer l’endossure au marteau et donc le cintrage du dos et de former les mors. Ensuite il faut préparer les plats.
➢ La couvrure : La couvrure est le moment du contre-collage de la matière de recouvrement du livre, d’emboîtage du corps dans la couverture, de confection de la coiffe et parfois de la pose de coins ou de bandes.
➢ La finissure : Etape finale de la reliure, la finissure comprend toutes les manipulations nécessaires à la perfectibilité de l’objet-livre.
➢ La dorure : Il ne faut pas confondre la dorure et l’estampage à froid. L’estampage à froid utilise des fers tièdes pour ne pas laisser de traces noires sur la matière de couvrure. La dorure à chaud permet de déposer tout type de matière (pas uniquement de l’or comme son nom l’indique), métal en feuille, film de couleur sur la matière de couverture des livres. La dorure permet de renseigner le lecteur sur le titre de l’ouvrage, parfois aussi sur son auteur, et sert à l’ornementation des plats et du dos.