En quittant son poste de Première ministre de la Nouvelle-Zélande, Jacinda Ardern montre que le pouvoir n’est plus sacré. Alors que les hommes, eux, ont souvent tendance à vouloir y rester à tout prix.
Les hommes s’accrochent souvent au pouvoir. Une femme a choisi de le quitter. Jacinda Ardern a décidé de ne plus être Première ministre de Nouvelle-Zélande. A 37 ans, elle est vidée de toute son énergie, selon ses propres mots : « Je n’en ai plus assez dans le réservoir », peut-on lire sur LesEchos. Ce n’est pas la première fois qu’un haut dirigeant quitte le pouvoir sans y être contraint. Catherine Guillouard, patronne de la RATP, a démissionné en septembre dernier pour s’occuper de ses parents âgés. Le pape Benoît XVI avait renoncé à son pontificat il y a dix ans, invoquant sa « vigueur qui, ces derniers mois, s’est amoindrie en moi d’une telle manière que je dois reconnaître mon incapacité à bien administrer le ministère qui m’a été confié ». Mais ces décisions sont rares. La dernière fois qu’un pape avait parlé de sa santé pour justifier son départ, c’était en 1294.
Travail privilégié
Jacinda Arden n’a certes gouverné depuis fin 2017 que des îles perdues dans le Pacifique, comptant moins de 5 millions d’habitants. Sa décision symbolise cependant un monde qui change. Et montre aussi, en négatif, celui qui ne change pas. Son départ montre d’abord que le pouvoir n’est plus sacré. Il ne mérite pas que des supposés dieux se tuent à la tâche. Jacinda Ardern, elle, veut être une femme normale. « Je suis humaine. Les politiciens sont des humains. Nous donnons tout ce que nous pouvons, aussi longtemps que nous le pouvons, et ensuite c’est l’heure. Et pour moi, c’est l’heure. » Ce qui ne l’a pas empêchée d’apprécier son poste : « Diriger un pays est le travail le plus privilégié que l’on puisse jamais avoir, mais c’est aussi l’un des plus difficiles », a expliqué Ardern. Avant d’expliquer que ce n’est pas l’origine de sa décision : « Je ne pars pas parce que c’est dur. Si ça avait été le cas, je serai probablement partie deux mois après avoir pris le poste ! » Dans un autre registre, la démission de la Première ministre symbolise aussi une époque où le travail ne passe plus avant tout. Où chacun et chacune s’efforce de trouver le fameux équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. « J’ai hâte de passer à nouveau du temps avec ma famille – après tout, de nous tous, ce sont eux qui ont fait le plus de sacrifices. »
Des présidents diminués
Ardern était enceinte de sa fille quand elle est devenue Première ministre. Elle ne l’a pas vu autant qu’elle l’aurait voulu, même si elle l’a emmenée à l’âge de trois mois à New York pour l’Assemblée générale des Nations Unies afin de pouvoir continuer de l’allaiter. Dans le discours où elle a annoncé son départ, elle lui a fait passer un message : « Maman a hâte d’être là quand tu vas commencer l’école cette année ». Ainsi qu’à son compagnon : « Finalement, marions-nous ! » Son avenir professionnel ? « Je n’ai pas de plan. Pas de prochaines étapes. » D’abord se reposer – ou se re-poser.