Clin d’oeil
Par : Samir Abdel Ghany
À la galerie Art Corner, l’art se fait passerelle vers l’âme. L’exposition « Portails », inaugurée par le maître Mohamed Abla, réunit deux univers distincts et complémentaires : celui d’Adham Chaker et celui de Ghada Abou Senna. Ensemble, ils tissent un dialogue plastique qui transcende les formes pour interroger l’existence humaine, ses épreuves et ses lueurs d’espérance.

Le retour introspectif d’Adham Chaker
Diplômé des arts appliqués, longtemps absorbé par le monde du design graphique, Adham Chaker revient à son amour premier : la peinture. Ses toiles en noir et blanc frappent par leur intensité dramatique. Entre les tourbillons de lignes sombres et les points infinis qui évoquent la complexité de l’existence, se déploie un espace de blancheur immaculée. Ce blanc devient protagoniste, métaphore de la pureté et du renouveau.
Chaque œuvre est traversée par une « porte colorée », minuscule mais décisive. Elle symbolise l’ouverture, l’issue possible, la promesse que même au cœur des labyrinthes de l’âme, une voie vers la lumière existe toujours. Dans ce langage pictural, Chaker explore la fragilité et la force de l’esprit humain, oscillant entre chaos et sérénité.
Ghada Abou Senna : La célébration de l’élan vital

À l’opposé, mais en parfaite résonance, Ghada Abou Senna cultive une énergie lumineuse et optimiste. Fidèle à sa pratique artistique continue, elle expose chaque année, enrichissant le paysage culturel de créations qui célèbrent la vie. Ses toiles sont des hymnes à la féminité et à la liberté : la femme y apparaît dans toute sa sensibilité, tandis que le cheval fougueux surgit comme symbole d’aspiration et de dépassement.
Avec une palette éclatante, elle pratique un abstractionnisme simple et poétique. Chaque couleur exprime une émotion, chaque forme invite à l’imaginaire. L’univers de Ghada est une invitation à rêver, à s’envoler au-delà des contraintes, à embrasser la beauté de l’existence avec légèreté et passion.


Un espace de dialogue et d’interprétation
Ce qui rend l’exposition unique, c’est la manière dont elle suscite des lectures multiples. Devant l’œuvre n°2 d’Adham Chaker, l’artiste Reda Khalil a livré une analyse saisissante : une grande spirale noire comme métaphore du chemin de vie, une base solide représentant l’ancrage terrestre, et en son centre une étincelle rouge-orangé, point de bascule vers une prise de conscience intérieure. Plus haut, une porte jaune et orange incarne l’ultime passage vers l’élévation spirituelle.
Une expérience au-delà du visuel

« Portails » n’est pas seulement une exposition, mais une expérience initiatique. Elle propose au visiteur d’interroger ses propres trajectoires, ses franchissements personnels, ses épreuves et ses renaissances. En confrontant le noir et blanc introspectif de Chaker aux éclats colorés d’Abou Senna, l’exposition compose un récit visuel sur la dualité de l’existence : chaos et harmonie, douleur et espérance, enracinement et envol.
À travers leurs regards croisés, les deux artistes rappellent que l’art est avant tout un chemin vers soi, une passerelle entre le visible et l’invisible, et une célébration de la capacité humaine à trouver – toujours – une porte ouverte vers la lumière.