La tempête Daniel a frappé l’est de la Libye le dimanche 10 septembre 2023, y causant des inondations importantes qui ont fait des milliers de morts et de disparus. Un épisode violent que les températures de l’eau et de l’air dans la région ont rendu encore plus intense.
Défaillance de l’État, particularité géographique, rupture de barrages… Les causes expliquant l’ampleur du bilan du passage de la tempête Daniel en Libye sont multiples. Mais l’une des causes majeures est bel et bien à trouver dans la violence du phénomène météo en lui-même, qualifié de « Medicane »(la contraction de « Hurricane », ouragan en anglais, et de Méditerranée).
Une Méditerranée très chaude
Cette puissance, qui avait déjà provoqué d’importants dommages en Grèce, est surtout liée à la température de l’eau de la Méditerranée, qui est particulièrement élevée. Depuis plusieurs mois, celle-ci évolue effectivement 2 à 3 °C au-dessus de ses valeurs habituelles.« Près des côtes libyennes, la température de la mer est trois à quatre degrés plus élevée par rapport aux normales », précise même, auprès du Monde, le climatologue Davide Faranda, Spécialiste des événements extrêmes et de leur lien avec les changements climatiques. Selon lui, la Libye a subi de plein fouet les impacts d’un Tropical Like Cyclone (TLC), une structure dépressionnaire verticale alimentée par l’énergie d’une mer très chaude. Il s’agit de la continuité du cyclone Daniel qu’ont connu la Grèce, la Turquie et la Bulgarie début septembre. Il ne s’était pas épuisé. D’habitude, ce genre de phénomènes est évacué vers l’est. Là, à cause du blocage en Oméga [un anticyclone avec deux zones de basse pression accolées, formant les « pattes » de la lettre grecque oméga]qui a provoqué les fortes chaleurs en France il y a plusieurs jours, il est d’abord resté longtemps sur la Grèce, ce qui explique le niveau des précipitations pendant de longues heures. Puis, il est resté statique en mer, entre la Sicile et la Grèce. Les pluies y ont été très violentes. Les courants atmosphériques l’ont ensuite entraîné vers les côtes libyennes, où il a aussi été attiré par les températures très élevées de la mer.
Or, c’est bien cette chaleur qui sert de « carburant » à ces phénomènes. Les hautes températures de l’eau favorisent effectivement l’évaporation de cette dernière, qui vient alors gonfler le potentiel pluviométrique des dépressions, perturbations et autres tempêtes.
Des températures élevées favorisent les pluies intenses.
La température de l’air peut également avoir une incidence sur ce genre de phénomènes car, plus elle est chaude, plus elle peut contenir d’eau.
La loi dite de Clausius-Clapeyron (du nom des chercheurs qui l’ont théorisée) dispose en effet que lorsqu’elle se réchauffe d’un degré, l’atmosphère peut contenir 7 % d’eau en plus. La quantité de pluies qui peut potentiellement tomber sur une région lors d’un épisode pluvieux s’en trouve donc augmentée d’autant.
Une tempête qui a eu le temps de se charger en eau
Dans le cas de Daniel, ces facteurs ont d’autant plus joué que la tempête, devenue ensuite un Medicane, s’est déplacée très lentement et a donc eu le temps de se charger en eau.
Comme le note la chaîne Météo, c’est le blocage en Omega responsable de la canicule tardive vécue par la France début septembre qui est responsable de cette lenteur de déplacement.
Un lien avec le réchauffement climatique
L’intensification de ce phénomène, liée à des températures de l’eau et de l’air très élevées, peut être considérée comme une conséquence du réchauffement climatique.
Comme l’a indiqué à l’AFP, Lizzie Kendon, professeure de sciences du climat à l’Université de Bristol, les inondations liées à la tempête Daniel « illustrent le type d’inondations dévastatrices auxquelles nous pouvons nous attendre de plus en plus à l’avenir » à mesure que le monde se réchauffe.
Si ce réchauffement, lié aux gaz à effet de serre émis par les activités humaines, a donc des conséquences sur l’intensité de ce type de phénomènes météorologiques, il n’existe aucun élément permettant de conclure qu’il les rendra également plus fréquents.