



Dans une salle pleine d’émotion, le rideau s’est levé à Zagazig sur une œuvre poignante, reflet d’un combat intérieur qui habite chaque être humain. Le spectacle « Ayn Basira » (L’œil clairvoyant), interprété par la troupe du palais de la culture de Deyerb Negm, s’est imposé comme un moment rare de théâtre engagé et spirituel, dans le cadre des saisons culturelles de l’Organisme Général des Palais de la Culture, présidé par le général Khaled El-Laban.
Le palais de la culture de Zagazig a récemment accueilli la représentation de « Ayn Basira », une pièce écrite par Ahmed Abdel Razeq et mise en scène avec force et précision par El-Sayed Aouni. Cette création s’inscrit dans le programme théâtral actuel du ministère de la Culture égyptien, sous la supervision de Mohamed Nassif, vice-président de l’Organisme Général des Palais de la Culture.
Le spectacle a été présenté en présence d’un jury de prestige, composé du metteur en scène Samir Zahir, du critique Ahmed Abdel Razeq, et de la décoratrice Dr Dalia Fouad.
Un conte cruel sur le choix, la tentation et la chute
L’histoire, construite sur une trame allégorique, explore l’éternel affrontement entre le bien et le mal. À travers le personnage énigmatique du « Vendeur », incarnation du malin, les spectateurs sont entraînés dans un univers où les destins s’achètent et se manipulent. Ce marchand de récits vend aux villageois des histoires inachevées, incomplètes, dont la fin dépend de celui qui en fait l’acquisition. Mais chaque choix a ses conséquences…
Le cœur du récit se resserre autour d’Abed, un homme simple, presque mystique, qui résiste aux manipulations du Vendeur. C’est alors que ce dernier cherche à l’atteindre par Ward, la femme qu’Abed aime. Elle exploite cet amour pour le pousser à commettre l’irréparable : tuer son propre frère, Ragheb, en échange d’une promesse de mariage.
Un théâtre total, qui touche les sens et l’esprit
Le décor signé Aya Lotfi épouse l’atmosphère trouble et symbolique de la pièce, tandis que les costumes, conçus en accord avec l’esprit dramatique du spectacle, renforcent les oppositions entre lumière et ténèbres. Les chorégraphies de Walid El-Masry, incarnées par des danseurs représentant les bras du mal, donnent au spectacle une dimension presque mythologique, traduisant physiquement l’ensorcellement progressif du village.
Le tout est porté par une distribution remarquable : Ashraf Talaat, Ziyad Shabana, Hadi El-Hadi, Lamia Abdallah, Fatma Hossam, et bien d’autres, qui incarnent avec intensité cette fable tragique. La musique originale de Mohamed Abdel Wahab, et les paroles signées Ahmed Abbas, viennent sublimer les moments clés du récit.
Une allégorie contemporaine du choix humain
Comme l’a expliqué l’auteur Ahmed Abdel Razeq, la pièce interroge la nature humaine :
« Chacun, tout au long de sa vie, est placé face à un choix : suivre la voie de la clairvoyance ou succomber à ses désirs. »
Dans un village oublié, où aucun train n’était passé depuis longtemps, l’arrivée d’un train mystérieux, transportant un seul passager – ce Vendeur d’histoires – devient le catalyseur d’un effondrement moral collectif. L’illusion vendue s’avère un poison. L’allégorie est forte, bouleversante, et profondément humaine.