Réarmer la France sans affaiblir davantage des finances publiques déjà exsangues: le laborieux budget 2025 à peine voté, le gouvernement se heurte à un nouveau casse-tête face à ce qu’Emmanuel Macron a décrit comme “la menace” de la Russie, selon l’AFP.
Dans une mise en garde télévisée contre les “dangers” suscités par le rapprochement entre Moscou et Washington, le président de la République a laissé entendre qu’un nouvel effort budgétaire difficile attendait les Français, avec “des réformes, des choix, du courage”.
Pour lui, les Européens doivent porter leurs dépenses militaires à 3% ou 3,5% de leur richesse nationale, contre 2% actuellement en France.
C’est une trentaine de milliards d’euros supplémentaires par an, une gageure pour le gouvernement tant les finances publiques sont contraintes.
D’autant qu’il exclut d’alourdir le déficit public dans une France tancée par Bruxelles pour ses dérapages et où les ministères sont priés de surveiller strictement leurs dépenses pour tenir l’objectif d’un déficit à 5,4% du PIB en 2025, contre environ 6% en 2024.
En comparaison, dans un virage majeur, l’Allemagne prévoit de débloquer des centaines de milliards d’euros pour son réarmement.
Or, en France, “avant même d’envisager d’augmenter les dépenses militaires, on était quasiment devant une équation insoluble” pour tenter de stabiliser la dette, souligne auprès de l’AFP François Ecalle, président du site spécialisé Fipeco.
Avec une hausse annuelle des crédits supérieure à 3 milliards d’euros, le budget de la défense est l’un des seuls à avoir échappé aux coupes opérées dans le budget 2025.
De 50,5 milliards d’euros cette année (hors retraites), il doit croître jusqu’à environ 67 milliards en 2030, selon le ministre des Armées Sébastien Lecornu, dans le cadre d’une loi de programmation militaire dotée de 413 milliards pour 2024-2030.
“Un +poids de forme+ de l’armée française à un peu moins de 100 milliards d’euros de budget annuel permet de durcir notre modèle d’armée”, a-t-il estimé dans Le Point.
La mobilisation des fonds européens, voulue à hauteur de 800 milliards d’euros par la Commission européenne, sujet au menu d’un sommet extraordinaire jeudi à Bruxelles, sera “probablement” insuffisante pour subvenir aux besoins français, a admis la porte-parole du gouvernement Sophie Primas.
La Commission, comme Berlin et Paris, veut aussi exclure les dépenses supplémentaires pour la défense du calcul des déficits excessifs.
Mais où trouver des marges de manœuvre alors qu’Emmanuel Macron écarte d’augmenter les impôts et le ministre Eric Lombard de tailler dans les dépenses sociales?
Le Premier ministre François Bayrou, qui a exprimé son attachement au “modèle social” français, évoquera ses orientations budgétaires vendredi matin sur Europe 1 et CNews.
“Pour arriver à des montants aussi colossaux” d’économies, “on ne peut pas laisser de côté la dépense sociale – qui représente la moitié des dépenses publiques – ni la dépense locale”, estime François Ecalle.