Par: Marwa Mourad
et Nermine Khattab
Le gouvernement égyptien a lancé en 2024 un ambitieux projet de réhabilitation des quartiers historiques d’Al-Ataba et d’Al-Moski. L’objectif : allier modernisation urbaine, sécurité publique et préservation du patrimoine architectural, tout en intégrant les acteurs locaux dans la transformation de ces pôles commerciaux emblématiques.
Un développement urbain respectueux de l’identité historique
Le ministère du Développement local a annoncé plusieurs mesures concrètes dans le cadre de la stratégie nationale visant à revaloriser la place Al-Ataba et le quartier commerçant d’Al-Moski. Les travaux concernent plusieurs artères majeures, telles que les rues Al-Gohary, Youssef Naguib et Al-Assili. Ce projet vise à redonner à cette zone son éclat architectural et esthétique, tout en assurant un cadre sécurisé pour les citoyens, les commerçants sédentaires et les vendeurs ambulants, afin d’éviter tout incident futur.
Une approche participative centrée sur les commerçants et les habitants
Le projet de réaménagement repose sur une vision collaborative, en concertation avec le gouvernorat du Caire et les principaux acteurs locaux, notamment les propriétaires de magasins et les vendeurs ambulants. Une expérimentation est déjà en cours à l’entrée du souk d’Al-Ataba, avec pour objectif d’améliorer la conception urbaine et les conditions de circulation. Cette initiative vise à optimiser les flux de visiteurs et de commerçants, à offrir des itinéraires accessibles aux véhicules d’urgence, à limiter les branchements électriques anarchiques, à faciliter l’accès aux commerces existants et à organiser les points de vente informels.
Elle s’accompagne également d’une volonté de valoriser l’architecture locale par la rénovation des façades, de mieux exploiter les espaces disponibles et d’affirmer l’identité visuelle du quartier. Ce projet s’inscrit dans une dynamique plus large de développement économique local, en promouvant l’emploi et en renforçant l’attractivité commerciale de la zone.
Une politique nationale pour moderniser les marchés populaires
Parallèlement, le ministère du Développement local a placé en 2024 la question des marchés informels au cœur de ses priorités. L’objectif est double : améliorer la qualité des infrastructures commerciales dans les gouvernorats et transformer les marchés informels en espaces structurés et modernes, générateurs d’emplois et sources de revenus équitables pour l’État.
Actuellement, l’Égypte compte environ 618 marchés officiels, dont 133 ont été rénovés et 105 sont en cours de modernisation. Toutefois, 380 marchés restent encore à réhabiliter. Parallèlement, sur les 1 753 marchés informels recensés, 109 ont déjà été restructurés et 37 sont en chantier.
Un plan d’action a été mis en œuvre pour moderniser ces structures : un modèle unifié de conception des marchés, adapté aux spécificités de chaque région, a été élaboré. Il prévoit notamment des zones de stationnement et des équipements de base.
Des actions concrètes pour encadrer le commerce informel
Les gouvernorats ont été invités à freiner l’expansion des marchés anarchiques, notamment ceux qui entravent la circulation. Le ministère veille également à l’ajustement des loyers dans les marchés réglementés, afin qu’ils soient alignés sur les prix du marché. Des mesures ont été prises pour recouvrer les arriérés de loyers et organiser des inspections régulières avec les autorités de contrôle.
La mise en œuvre de la loi sur les vendeurs ambulants et la régulation des marchés de rue (swiqqat) constitue un volet essentiel du projet, afin d’assurer discipline et hygiène dans ces espaces. Le plan prévoit également le recours à des entreprises spécialisées pour l’entretien des marchés, l’installation de postes de sécurité, des dispositifs de prévention industrielle et des contrôles sur les produits proposés à la vente.
Une vision durable, ouverte à l’investissement privé
Le ministère a poursuivi le suivi des actions menées dans les gouvernorats pour cartographier les terrains vacants susceptibles d’accueillir de nouveaux marchés réglementés. Une stratégie économique durable est en cours d’élaboration pour la gestion de ces nouveaux espaces. Elle repose sur des partenariats public-privé, afin de garantir leur exploitation optimale, tout en créant des emplois durables et en assurant une rentabilité économique pour les investisseurs et l’État.
Immeuble Tiring : Coup de souffle
Le gouvernement a lancé la réhabilitation et le développement du marché populaire d’Al-Ataba, au Caire. Il vise à moderniser et à redynamiser cette zone emblématique tout en préservant son patrimoine architectural unique.
Ce projet est piloté par plusieurs ministères et institutions nationales et internationales, parmi lesquels figurent le ministère du Développement local, le gouvernorat du Caire, l’Organisme national d’harmonisation urbaine (ONHU), le ministère du Logement et le Programme des Nations unies pour le développement (ONU-Habitat). Les travaux ont débuté dans les rues Al-Esseili, Al-Gohari, Youssef Naguib et leurs extensions, qui forment le centre de ce développement urbain, combinant modernisation des infrastructures, sécurisation contre les incendies et valorisation architecturale.
Le plan de réhabilitation cible également l’immeuble Tiring, ce chef-d’œuvre néo-baroque, symbole de la mixité culturelle du Caire.
Le gouverneur du Caire, le Dr Ibrahim Saber, a confirmé que le développement du bâtiment patrimonial « Tiring » à Attaba est presque achevé, permettant à la capitale de restaurer l’un de ses bâtiments patrimoniaux les plus emblématiques.
Saber a souligné que le gouvernorat du Caire a pu restituer les caractéristiques du bâtiment grâce à d’anciennes photos. Les décorations, ornements, marbres, corniches et moulures manquants ont été reconstitués. Le dôme a été restauré, la boule de fer marquant le sommet du bâtiment a été remplacée, le globe et les quatre statues qui le soutiennent ont été modernisés, et leurs vitraux ont été restaurés en coopération avec l’Autorité de coordination urbaine.
Il a ajouté que les autorités exécutives du gouvernorat ont éliminé tous les empiètements et saillies sur le bâtiment, et que les façades des commerces situés en contrebas sont en cours de restauration.
Il a souligné que le projet de développement d’Attaba représente une belle opportunité d’allier authenticité et modernité tout en préservant le patrimoine culturel de cette région touristique.
L’immeuble Tiring est situé dans le quartier d’Attaba, au Caire. Il a été conçu par l’architecte juif autrichien Oskar Horowitz au début du XXe siècle. Il appartenait au riche homme d’affaires juif Victor Tiring, né à Istanbul, qui souhaitait imiter les hôtels commerciaux César Ritz en Europe.
Il a choisi le quartier d’Attaba, car il reliait le vieux et le nouveau Caire, faisant de « Tiring » l’un des plus grands magasins à étages du Caire à l’époque. Le bâtiment, de style néo-baroque, se distingue par ses sculptures et son magnifique dôme. Son élément le plus emblématique reste les quatre anges portant le globe.