Editorial. Deux ans après avoir échoué à réformer les retraites, Emmanuel Macron, candidat à sa propre succession, remet l’ouvrage sur le métier, mais, cette fois de façon radicalement différente. La création d’un système universel pour rendre le système plus lisible et plus juste et permettre à chacun de gérer sa vie professionnelle comme il l’entend n’est plus à l’ordre du jour.
L’objectif est désormais de faire travailler plus longtemps les Français, afin de faire face à la fois au vieillissement démographique et au déséquilibre des finances publiques, qui s’est aggravé avec la série de crises que le pays a subies depuis le début du quinquennat.
Le projet non encore détaillé par le président sortant, mais dont le principe a été confirmé par ses proches, consiste à repousser l’âge de départ à la retraite à 65 ans, contre 62 ans actuellement. L’allongement se ferait progressivement, en contrepartie de l’augmentation du montant de la retraite minimum à 1 100 euros pour une carrière complète. Les régimes spéciaux (SNCF, RATP, EDF…) devraient être également supprimés petit à petit. La nouvelle mouture proposée est d’abord un constat d’échec.
Le projet initial, compliqué et mal préparé, avait suscité une forte mobilisation sociale, avant d’être définitivement ajourné en raison de la crise pandémique. L’idée était d’améliorer l’équité entre les cotisants. Mais, très vite, la réforme est apparue comme opaque et peu sécurisante, car personne n’avait une idée précise de ce qu’il allait toucher en fin de carrière.
En outre, la question de l’équilibre financier avait été au départ éludée, alors même que le creusement des déficits est redevenu le sujet central des prochaines années. Cette fois, l’objectif prioritaire est bien de faire des économies, de l’ordre d’une quinzaine de milliards d’euros, pour éviter autant que possible d’avoir à relever les impôts. Les Républicains, comme le Medef, sont favorables à un recul de l’âge légal de départ à la retraite. Mais la plupart des autres candidats à l’élection présidentielle rejettent cette solution.
Elle est également contestée par les syndicats, CFDT en tête, qui la juge «injuste et brutale». Le candidat Macron prend donc un incontestable risque à l’avancer au moment où il fait figure de favori dans la compétition présidentielle. Son pari est que les esprits ont évolué. Après deux années marquées par la crise due au Covid, le conflit en Ukraine vient renforcer le sentiment que les prochaines années s’annoncent économiquement difficiles et que la pérennisation du modèle social français est loin d’être acquise. La plupart de nos voisins européens appliquent déjà un âge de départ à la retraite d’au moins 65 ans. (…)