


Dans la lumière dorée du Sinaï, les voix, les mains, les couleurs et les gestes de la tradition se sont élevés au rythme du vent du désert. Le premier Forum du Sinaï pour les Arts de la Badiya poursuit ses activités en plein cœur d’Al-Arich, au palais de la culture, célébrant avec éclat le 43e anniversaire de la libération de la péninsule. Cet événement, organisé sous le patronage du ministère de la Culture et du gouvernorat du Nord-Sinaï, redonne vie à un patrimoine millénaire que le sable n’a jamais effacé.Dès l’aube, l’effervescence gagnait les ateliers où l’on travaille la matière et le rêve : tissages bédouins, poupées de chiffon, faïence peinte à la main, objets de bois chantant l’enfance. Le vice-président de l’Autorité générale des palais de la culture, Mohamed Abdel Hafez Nassef, s’est mêlé à l’effort des artisans, échangeant, écoutant, encourageant. Il ne s’agissait pas seulement d’art pour l’art, mais d’un geste politique, social : transformer le savoir-faire en projet, le rêve en revenu, la mémoire en avenir.Les enfants, eux aussi, ont trouvé leur place au cœur de cette fête. Des ateliers de dessin libre et de contes interactifs, animés avec passion par la chercheuse Dr Hanan Moussa, ont permis de transmettre, dans la joie, les subtilités du patrimoine sinaïtique. Également présente, la jeune Imane Galal a partagé son parcours : d’un simple atelier, elle a tiré l’élan nécessaire pour lancer sa propre initiative. Preuve vivante que la culture peut être un tremplin.Plusieurs artistes ont illuminé les lieux : la plasticienne Soham Ismaïl a initié le public à l’art du découpage, tandis qu’Ayman El-Saadany recréait l’enfance avec ses jeux en bois sculpté. Le marionnettiste Amr Hamza a donné naissance à de délicates figures articulées, et Dr Omayma Rachad a fait danser les pinceaux sur la céramique, entre arabesques islamiques et motifs inspirés du Sinaï.La créatrice Khadra Ibrahim, quant à elle, a présenté des modèles de vêtements bédouins revisités, tissés dans la mémoire collective et brodés de dignité. Tout cela s’accompagnait d’un marché d’artisanat traditionnel, rassemblant plusieurs associations locales, mettant en avant l’ingéniosité des femmes du Nord-Sinaï et le travail acharné des familles productrices.Et puis, lorsque le jour a décliné, le théâtre du palais a résonné d’une fête aux mille visages. Les troupes folkloriques venues de Matrouh, du Fayoum et de Tor ont enchanté le public. La troupe des Bédouins du Fayoum a évoqué, en rythmes chaloupés et vêtements chamarrés, la douceur de la vie à Wadi El-Rayan. Celle de Matrouh, menée par Hassan Amer, a ravi par sa vigueur collective et ses tableaux évoquant les fêtes tribales. Enfin, la troupe de Tor a plongé le public dans les noces sinaïtiques, avec leurs chants sacrés, leurs danses féminines pleines de grâce et de spiritualité.Ce forum n’était pas qu’un événement culturel. C’était une promesse. Une déclaration d’amour à la culture bédouine, au peuple du Sinaï, à ces mains qui résistent, à cette mémoire qui persiste. Un souffle ancien, renouvelé, qui traverse le désert pour dire : ici, la beauté est toujours vivante.