Il aura fallu le charisme et les accès de folie de Jean-Luc Mélenchon pour réussir l’exploit de revitaliser la gauche française que l’on croyait défunte. Certes, la gauche de Mélenchon n’est pas celle des présidents Mitterrand et Hollande, ou de la maire de Paris Hidalgo et son embarrassant 1,7% décroché aux dernières élections présidentielles, selon L’Echo, le 20 juin 2022. La gauche de Mélenchon représente une rupture, un vieil anticapitalisme plus proche d’un Jeremy Corbyn que du New Labour du détesté Tony Blair; une gauche qui prêche la fin du néo- libéralisme (alors que la France est l’un des pays les moins néolibéraux du monde) parce que “ça a été démontré, ça ne marche nulle part”; une gauche plus de combat que de gouvernement, et de fait Mélenchon ne gouvernera pas, ne sera pas Premier ministre et n’aura pas de majorité parlementaire, alors qu’il a proclamé pendant des semaines la certitude du contraire. Cependant, si lors de la précédente législature, Mélenchon a réussi à donner du fil à retordre à Macron avec seulement 17 députés de la France Insoumise, les 131 de la coalition Nupes qui font leur entrée à l’Assemblée nationale promettent de transformer le Parlement en une véritable scène de spectacle. Mélenchon a désormais ressuscité non seulement la gauche, mais aussi l’opposition.
“Chavez gaulois”
Le «Chavez gaulois» est un rêveur tiers- mondiste amoureux de l’Amérique latine, profondément anti-OTAN, qui exhumait il y a encore quelques mois des formules des années 1970 pour souhaiter une France “non-alignée”. Il est devenu le chef de l’opposition au moment même où l’Europe et l’Occident retrouvaient leur unité et leur élan pour s’opposer aux horreurs de Poutine. Longtemps raillé, le tribun originaire de Tanger rate l’objectif du fauteuil de Premier ministre, mais réussit son coup en promettant de rendre la vie difficile à Macron pour les cinq prochaines années. Il a le droit de dire des choses qui seraient impardonnables pour d’autres et contrevient à tous les codes de la politique contemporaine: bourru et irascible, il est capable de crier “La République, c’est moi!” au visage des policiers venus perquisitionner le siège du parti, mais aussi de refuser des selfies à des fans dans la rue ou de crier “Ne me touchez pas!” à des électeurs trop affectueux à la fin d’un meeting. D’autres seraient accusés d’impolitesse, lui en fait une vertu, un signe de sincérité. Avec énergie et une volonté de compromis, il a fondé une Nouvelle Union populaire écologique et sociale qui a fini par trouver des partisans insoupçonnés comme, par exemple, Raphael Glucksmann, député européen et intellectuel de gauche, qui dénonce depuis toujours les régimes totalitaires de Moscou, Pékin et Damas et défend l’Europe. Longtemps raillé, le tribun originaire de Tanger rate l’objectif du fauteuil de Premier ministre, mais réussit son coup en promettant de rendre la vie difficile à Macron pour les cinq prochaines années.